Pendant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron a proposé la mise en place de conventions démocratiques pour relancer la confiance en l’Europe et aux valeurs européennes. Ces conventions, qui visent à refonder une « Europe unie, souveraine et démocratique », et qui sont principalement fondées sur le débat citoyen, sont à l’essai en Roumanie.
Plus de dix ans après l’échec du projet de Constitution européenne, l’espoir de refonder une Europe plus démocratique et unie n’a pas dit son dernier mot. En effet, lors de sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait exprimé son souhait de faire de l’Europe un continent plus intégré, fondé sur un dialogue démocratique entre les citoyens et leurs représentants. Il a ainsi proposé la mise en place de conventions démocratiques qui auraient pour objectif de repenser l’Europe.
Emmanuel Macron, chef de file du nouvel espoir européen
Lors de son discours à Athènes prononcé en septembre dernier, le président Macron avait rappelé qu’une réforme de l’Europe était nécessaire pour pouvoir avancer dans la bonne voie : « Qu’avons-nous fait de notre démocratie, qu’avons-nous fait de notre souveraineté ? Aujourd’hui, la souveraineté, la démocratie, la confiance sont en danger. Ce soir, je veux que collectivement nous retrouvions la force de refonder notre Europe, en commençant par l’examen critique sans concession de ces dernières années ».
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Outre les conventions démocratiques, Emmanuel Macron a proposé un budget, un Parlement et un ministre des Finances de la zone euro. Il a également avancé la constitution de listes transnationales pour les élections européennes qui se tiendront en 2019. Avant la rentrée, il avait rendu visite à douze chefs d’État européens afin d’exposer son projet pour l’Europe et de traiter les dossiers sensibles que sont les travailleurs détachés, la politique commerciale et migratoire et la défense commune.
Que sont ces conventions démocratiques ?
Sur son site, le parti La République en marche (LREM) explique ce que sont les conventions démocratiques : « Pendant six à dix mois, dans chaque État, selon des modalités laissant la place aux choix des gouvernements et des collectivités, un débat européen sera organisé sur le contenu de l’action de l’Union, sur les priorités qu’elle doit avoir. En se nourrissant de ces débats, les gouvernements européens élaboreront une feuille de route brève, avec quelques défis communs et des actions précises, traçant les priorités d’action de l’Union et leur calendrier de mise en œuvre pour les cinq ans à venir ».
Plus concrètement, l’objectif de ces conventions est de collecter les idées des Européens concernant les grandes questions européennes. Un des moyens qui le permettrait serait de faire du porte à porte, comme LREM a pu le faire lors de sa campagne. De plus, les conventions démocratiques passeraient par des consultations en ligne et des débats locaux. Parmi les questions qui seraient soumises à l’opinion des citoyens européens, les députés ont établi une liste générale des sujets abordés : Quelles sont les valeurs de l’Europe ? Qu’attendez-vous de l’Europe dans votre quotidien ? Quel changement attendez-vous de l’Europe ?
Un comité de pilotage national présent dans chaque État aurait pour mission de transmettre les résultats des consultations et débats à un autre comité dirigé par les institutions européennes. Ce dernier serait donc chargé de définir les grandes priorités révélées par les résultats. Ces conventions démocratiques seraient officialisées par le biais d’un sommet des chefs d’État européens, qui pourraient ratifier une Charte définissant les principes fondamentaux de ces conventions. Ce « marketing itinérant » pourrait cependant montrer très rapidement des limites.
D’autant que nombre de questions restent sans réponse. Comment arriver à créer un véritable débat européen, pas seulement vingt-sept débats sur l’Europe cloisonnés par les frontières nationales ? Comment faire participer l’ensemble des participants et pas seulement les partisans de l’Europe ou ceux d’Emmanuel Macron dans un débat pour lequel il s’est beaucoup engagé. Enfin, la méthodologie qui sera utilisée pour transformer les réponses recueillies en véritables projets paraît assez incertaine.
La Roumanie, premier pays test
De janvier à juin 2019, la Roumanie assurera la présidence du Conseil de l’Union européenne. A cet effet, le pays a entamé des processus de débat dans l’esprit des conventions démocratiques. Citoyens et valeurs seront les deux moteurs de cet élan démocratique, a affirmé le ministre des Affaires européennes roumain Victor Negrescu. Il a insisté sur l’importance de la démocratisation des affaires européennes, qui peinent à toucher les classes populaires.
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Des événements autour de sa présidence internationale seront organisés dans 40 villes roumaines afin de sensibiliser sur le débat démocratique. « La présidence ne concerne pas les ministres, ni le gouvernement, ce sont les citoyens roumains doivent se l’approprier », a-t-il déclaré à la presse. Plus de 60 000 personnes y sont attendues.
Ces conventions démocratiques arrivent dans un contexte tendu. En effet, de nombreuses manifestations ont éclaté en raison des réformes de la justice entreprises par le gouvernement. Selon la Commission européenne, ces réformes pourraient compromettre l’indépendance de la justice, qui pourrait tomber sous le contrôle du pouvoir politique, un terreau pour la corruption.