Paul Pâques, récemment diplômé du Master 2 de l’Institut d’Etudes européennes, a relancé et présidé l’association Eurosorbonne pendant deux ans. Portrait d’un étudiant engagé.
On donne rendez-vous à Paul dans le quartier de l’Odéon, l’un de ses lieux de prédilection dans la capitale qu’il a quittée il y a quelques mois déjà. Le ciel est gris et menaçant en ce jeudi de début août. Protégé par l’auvent d’une terrasse discrète, dans une rue peu passante, Paul raconte son aventure, l’aventure d’Eurosorbonne. La voix est ferme, le ton direct et le vocabulaire choisi, mais parfois une hésitation, un doute vient ébranler un discours visiblement préparé. La carapace d’assurance et de professionnalisme se fendille par endroits pour laisser voir l’étudiant fraîchement diplômé qui rempile pour une année à Bruges, et l’ami qui se confie.
D’où viens-tu ?
J’aime à me définir comme un Orléanais en Sologne, de parents Belges ; autrement dit, un Européen.
Raconte-nous l’aventure Eurosorbonne.
C’est parti d’un point mort quand j’étais en M1. Nous manquions vraiment d’une vie de promotion. À la suite du cours de simulation du Conseil Européen avec Philippe Perchoc qui nous a beaucoup soudés, nous avons décidé de relancer l’association Franchement Europe. Il s’agit d’une ancienne association de l’Institut d’Etudes européennes [I.E.E] dont nous avait parlé Madame Delteil. Il aurait été idiot de ne partir de rien alors qu’une première structure existait. Cela nous permettait de nous inscrire dans la continuité de la vie étudiante de l’I.E.E. Nous avons rebaptisé l’association Eurosorbonne.
L’association était alors principalement constituée de M1, ce qui était un bémol. Pour créer une vie de promotion, il faut se baser sur les trois promotions. Nous voulions organiser un voyage d’études à Bruxelles, mais faute de temps et s’y prenant au second semestre on n’a pas pu aller au bout de notre initiative. Je me suis alors engagé à rester à l’I.E.E pour poursuivre ce projet qui me tenait à coeur. Dans cette aventure, je dois tout d’abord remercier Matt, qui m’a beaucoup aidé, soutenu et secondé dans la reprise et le lancement de cette association par ses idées, son soutien, ses initiatives.
Quand est-ce que l’association a vraiment pris son essor ?
Lors de ma deuxième année de Master [NDLR : en 2015-2016]. On a recruté en L3, M1 et M2, et nous avons lancé les projets. C’est ainsi qu’à la fin de la première année, partis de 7, 8, on constitue aujourd’hui une équipe de 17. Tout au long de cette année, nous avions vocation à améliorer la vie de l’I.E.E. En terme de convivialité avec l’organisation d’afterworks, mais aussi de stimulation intellectuelle. Par exemple, avec la rencontre de professionnels, notamment à l’occasion de la journée des métiers de l’Europe ou lors de conférences sur la COP21 et sur l’euroscepticisme. Enfin, lors d’un voyage d’études à Bruxelles, nous sommes partis à la découverte des institutions européennes dont on parle tant en cours mais dont on connaît peu la réalité quotidienne. Nous avons tenté de créer un esprit de promotion autour de cet objet d’étude qu’est l’Union européenne.
Quel bilan tires-tu de cette année ?
J’en tire d’abord une expérience riche. J’invite tous les étudiants à s’engager, même à l’échelle basique de la vie étudiante. Il y a moyen d’améliorer les choses autour de soi et c’est ce qui nous a tenu à coeur. J’aime à comparer l’association Eurosorbonne à une start-up, c’est un projet avec des ressources, le tout est de coller à un public cible et de coordonner tout ça. Donc en terme d’expérience professionnelle c’est très fort. Maintenant le bilan est positif mais il y a des choses à améliorer telles qu’une meilleure coordination avec le corps professoral dont on a pas pu être assez proche au cours de cette année, ainsi qu’une meilleure implication de l’ensemble des étudiants. C’est bien d’avoir un noyau dur qui s’active autour de projets, ce serait encore mieux d’avoir une contribution de l’ensemble des promotions.
Est-ce que c’était difficile de lâcher ton bébé Eurosorbonne ?
Non, ça n’a pas été difficile dans la mesure où j’avais le sentiment du devoir accompli, bien qu’il reste beaucoup à faire. Naturellement, je me souciais que l’association soit confiée à quelqu’un de confiance, à une équipe active. Je souhaitais que cela ne finisse pas comme Franchement Europe qui, lors de la passation, est décédée. Mais j’ai confiance dans l’équipe qui reste à Paris 3 l’année prochaine et à qui j’ai confié le bébé.
Tu pars au Collège d’Europe en septembre ! Raconte-nous les étapes de ton admission.
Je ne connaissais pas véritablement le Collège d’Europe. Puis un assistant académique du Collège est venu en parler à l’I.E.E. Je me suis renseigné et j’ai compris que c’était très élitiste et qu’il était difficile d’être admis. Le tout pour le tout je me suis dit “cela ne coûte rien de candidater” et j’ai déposé ma candidature sans vraiment trop y croire. Mon admission me donne l’envie de dire aux autres “candidatez, vous ne perdez rien à le faire ! un peu de confiance et le tour est joué”. Et pour preuve, nous sommes 8 de l’I.E.E, actuels ou anciens étudiants à avoir été admis au Collège. Et je pense que ce chiffre est éloquent sur la capacité de l’I.E.E à nous former pour des postes ou des écoles avec un fort niveau d’exigence. On a tendance à critiquer l’Université française mais il faut savoir qu’elle représente une vraie richesse en terme d’enseignement et de capacité à la formation.
Après, sur le processus même de sélection, cela se passe sur dossier. D’après ce que j’en sais, on est plus sélectionné pour la personnalité que pour un niveau académique, bien que le niveau soit pris en compte malgré tout. Puis il y a un entretien d’admission si vous avez été présélectionné. Le Collège d’Europe a deux campus : un à Bruges, et un à Natolin, en Pologne. Il se constitue de 5 programmes d’études : relations internationales, droit, économie, études interdisciplinaires et mon programme, politique et administration.
Vas-tu t’engager à nouveau dans la vie associative ?
Je dirais qu’à chaque fois que j’arrive quelque part, j’aime à contribuer aussi modestement soit-il à améliorer la vie de mes camarades. Au sein du Collège d’Europe, il y a plusieurs associations, dont une qui prend en charge l’organisation d’un voyage d’études pour les étudiants. Je m’y retrouverais facilement en terme de compétences acquises cette année. Après, je tiens à m’engager dans des associations plus de réflexions qui se rapprochent du Think tank, que ce soit sur l’énergie, les transports. Ce genre d’associations existe au Collège d’Europe.
Si tu avais une baguette magique et que tu pouvais obtenir le poste que tu veux, le métier que tu veux, au niveau hiérarchique que tu veux, que deviendrais-tu ?
J’aimerais intégrer les services juridiques du Parlement européen afin de me mettre au service de cet organe démocratique de l’Union européenne, représentant les peuples. Et cela ne vous aura pas échappé, j’aime les responsabilités et celles d’un chef de service ou chef de section me paraissent intéressantes.
Raconte-nous quelque chose qui t’a marqué cette année.
La cérémonie de remise des diplômes organisée par et pour les anciens M2, aujourd’hui sur le marché du travail. Bien que non coordonnée avec les activités d’Eurosorbonne, cette cérémonie rentre complètement dans cette nouvelle aspiration des étudiants à former une sorte de communauté dont on reconnaît l’existence, ne fût-ce qu’à l’occasion d’une telle cérémonie.
Le mot de la fin ?
J’aimerais laisser aux étudiants ce message : engagez-vous et faites-le avec paix. C’est en cela qu’on en tire une certaine sérénité, malgré tous les coups de stress entraînés par l’engagement. Engagez-vous avec professionnalisme : ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait. Il me semble que peu importe ce que vous faites, si vous le faites bien vous êtes sûrs de réussir. Et enfin, engagez-vous avez passion. Sans passion, cela sera dénué de sens pour vous, mais vous aurez également du mal à expliquer le sens de vos démarches aux autres.
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Elena BLUM