Le Parti Pirate est arrivé en troisième position lors des élections législatives, samedi 29 octobre dernier, malgré des sondages très positifs à la veille des élections. Leur percée dans le panorama politique islandais demeure toutefois fulgurante, ils arrivent à tripler le nombre des députés, ce qui pousse le premier ministre sortant, Sigurdur Johannsson, à annoncer sa démission le lendemain.
Ces résultats aux élections législatives sont une déception pour les Pirates islandais. Le jeune parti radical n’a pas pu enregistrer la percée annoncée par les sondages au cours des mois précédents. Ils obtiennent 14,5% des voix, et par conséquent 10 sièges au Parlement islandais, loin des 20% estimés par les spécialistes avant les élections. Le Parti Pirate, formation anti-establishment islandaise, est désormais la troisième force politique du pays, derrière le parti conservateur de l’Indépendance et les radicaux de Gauche Verte.
Le Parti de l’Indépendance, dirigé depuis 2009 par l’actuel ministre des finances, Bjarni Benediktsson, a réalisé un score plus élevé que prévu, en obtenant 29 % des voix et 21 sièges, alors qu’il avait été mis en cause au mois d’avril, lors du scandale des Panama Papers. Il avait été accusé de détenir une société offshore, mais a refusé de démissionner contrairement au premier ministre de l’époque, Sigmundur David Gunnlaugsson, ce qui a abouti à la convocation d’élections législatives anticipées et à la nomination de Sigurdur Johannsson comme premier ministre intérimaire.
Un bilan économique favorable à l’échec des Pirates
Les Islandais ont préféré voter en faveur de la prospérité économique plutôt que pour le bouleversement démocratique soutenu par le Parti Pirate. Les effets de la crise bancaire de 2008 ont été dépassés, et aujourd’hui la petite île de 330 000 habitants vit une période de croissance record et de plein-emploi.
Benediktsson a même affirmé lors de sa soirée électorale vendredi 28 octobre être en « position très forte pour gouverner ». Le président de la commission des affaires étrangères de son parti, Gunnlaugur Olafsson, a estimé quant à lui que « le Parti pirate avait au départ une position libertarienne qui pouvait être aussi de droite, mais sa leader a voulu des alliances à gauche et le parti s’est divisé ».
Le Parti Pirate de Brigitta Jonsdottir, 49 ans, a connu en effet un échec électoral samedi dernier. Elle avait conclu des négociations préélectorales avec les trois autres partis d’opposition de gauche afin d’assurer sa victoire, mais les quatre partis n’arrivent pas à obtenir les 32 sièges nécessaires pour avoir la majorité parlementaire. Le Parti des Rouges-Verts parvient à élire dix députés, à l’égal du Parti Pirate, les Centristes quatre et les Sociaux-Démocrates trois.
Etant donné qu’une coalition semble impossible entre les partis de gauche et ceux de droite, dimanche 30 octobre au soir, le premier ministre islandais Sigurdur Johannsson a annoncé sa démission : « En vertu de la Constitution, j’ai remis ma démission [au président Gudni Johannesson] qui m’a demandé de rester en fonctions jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement ».
Un échiquier politique éclaté
Brigitta Jonsdottir a préféré adopter l’optimisme face aux résultats des législatives : « on n’avait jamais cru qu’on aurait plus de 30 % des voix », a-t-elle avoué samedi lors de l’annonce des scrutins. L’ancienne collaboratrice de WikiLeaks a mit l’accent sur la progression électorale de son parti, qui est passé de trois à dix députés élus, en même temps qu’elle exprimait sa déception face au soutien des islandais pour le « gouvernement Panama ».
Le Parti de l’Indépendance et son allié traditionnel, le Parti du Progrès, ne disposent que de 29 sièges, et il leur faudra donc trouver un nouvel allié pour gouverner. Néanmoins, aujourd’hui, le Parlement est éclaté comme jamais : il y a sept partis représentés, mais pas de gouvernement stable en vue.
Benediktsson pourrait se tourner éventuellement vers le nouveau parti de droite, « Redressement », créé cette année par le publiciste Benedikt Jóhannesson, un militant pro-européen, issu du Parti de l’Indépendance qui est d’ailleurs traditionnellement opposé à toute adhésion à l’Union européenne. Ce sujet demeure sensible et au cœur des débats politiques, et il semble très difficile pour ces trois partis de trouver un accord capable de permettre la formation d’un nouveau gouvernement. « Il n’y a pas de majorité en Islande pour négocier une adhésion et les résultats de ces élections le confirment », a expliqué Benediktsson dès samedi soir.
Ces prochains jours seront cruciaux pour le futur politique de l’Islande. Le parti de Brigitta Jonsdottir n’accédera très probablement pas au pouvoir, et elle risque même de voir un de ses alliés négocier avec le Parti de l’Indépendance, une pratique très courante ancrée dans le système politique islandais et éloignée des vœux de renouvellement démocratique voulus par les Pirates.