Ancien président du Conseil italien, Silvio Berlusconi marque son retour sur la scène politique avec la victoire de la coalition du centre droit dans les élections régionales en Sicile. L’occasion de revenir sur le parcours d’un homme qui a marqué la vie politique de son pays pendant plus de vingt ans.
Rien ne destinait Il Cavaliere à gouverner un jour l’Italie. Protagoniste d’une ascension exceptionnelle vers le pouvoir, il doit sa réussite à son génie dans le domaine de la communication. Homme d’affaire qualifié, il fonde rapidement le holding familiale Fininvest, et posséde trois chaînes de télévision, des journaux, l’édition Mondadori et le club de football Milan AC. A la télévision, il tente de se montrer en phase avec son public, avec succès, puisqu’il devient la plus grosse fortune d’Italie pendant dix années. Ce n’est qu’en 1994 qu’il se lance dans la politique, en créant le parti Forza Italia, composé essentiellement de cadres de Fininvest, qui remporte la même année les élections générales. Mais son gouvernement s’écroule quelques mois après lorsque ses alliés, de la Ligue du Nord, l’abandonnent. C’est en 2001 qu’il reconquiert le pouvoir, qu’il conserve jusque 2006. Homme politique déterminé, il revient deux ans plus tard, pour une troisième fois jusque 2011 où la pression populaire et internationale le contraint à démissionner. Lorsqu’il cède le gouvernement à l’économiste Mario Monti et est déchu de son mandat de sénateur pour fraude fiscale après vingt ans au Parlement, tout le monde voit là le point final à sa vie politique. Mais, fin 2012, il revient et sauve son parti, pourtant près du déclin, qui arrive proche du Parti Démocrate au Parlement. Il est condamné définitivement en 2013 par la Cour de cassation italienne.
L’homme aux scandales
Cause de sa popularité comme de son impopularité, les années de pouvoir de l’ancien président du Conseil ont été marquées par de nombreuses affaires personnelles et judiciaires qui ont entachées son image et conduit à sa chute. Depuis ses débuts dans la politique, il a d’ailleurs toujours provoqué un fort clivage politique. Malgré son succès dans les urnes, l’opposition a toujours refusé de voir en lui une quelconque légitimité à gouverner. Parmi les nombreuses frasques qui ont ponctué le chemin du Cavaliere, il était accusé notamment de faire voter des lois en faveur de ses amis et de la sienne, afin d’échapper à la justice. Incartades verbales ou diplomatiques, affaires de mœurs et scandale des soirées « bunga bunga », liens amicaux avec son homologue russe Vladimir Poutine, liens avec la Cosa Nostra à travers sa collaboration avec Marcello Dell’Utri, il serait difficile de considérer la carrière politique de Silvio Berlusconi sans évoquer les affaires qui l’ont ponctuée et y ont mis un terme.
Garder le pouvoir, coûte que coûte
Pourtant, malgré les problèmes de crédibilité, Berlusconi surprend par la capacité qu’il a eu à rester au pouvoir dans un pays où règne l’instabilité gouvernementale. En fait de n’être que le roi des extravagances, il a su s’affirmer comme leader politique. Saisir l’opportunité pour se faire une place d’abord. Au début des années 1990, l’État italien apparaît corrompu et la période marque la fin de l’hégémonie de la Démocratie chrétienne et du Parti socialiste italien. Berlusconi est vu comme un nouveau type de dirigeant, symbole de la prospérité économique. Avec son parti Forza Italia, il défend la liberté, la famille, la tradition chrétienne et le travail. Expert dans l’art de la coalition, avec la Maison des libertés puis le Peuple des libertés par exemple, c’est naturellement que le Cavaliere s’est fait une place dans le monde politique italien. Mais, critiqué de part et d’autre, accusé à plusieurs reprises, il détient le record de longévité à la tête du gouvernement italien depuis la Seconde Guerre mondiale. Alliance très forte de toutes les droites face à la faiblesse et la division de la gauche, la recherche d’un État entreprise qu’il incarne, la conquête et l’exercice du pouvoir par le marketing inspiré par le tv-show et la télé-réalité, sont autant d’éléments qui expliquent les neuf années de Berlusconi au pouvoir, jusqu’à sa condamnation en 2013.
Une carrière non-achevée
Les élections régionales siciliennes du 5 novembre dernier marquent, contre toute attente, son retour sur la scène politique. Avec cinq points d’avance sur le Mouvement 5 Étoiles, et le renvoi de la gauche sur la dernière marche du podium, l’entente entre Silvio Berlusconi, Matteo Salvini et Giorgia Meloni pour soutenir Nello Musumeci a permis à ce dernier d’être élu gouverneur de la Sicile. Alors que les élections générales auront lieu dans quelques mois, ce succès est une aubaine pour l’ancien président du Conseil. En effet, selon les mots de Giorgia Meloni, dirigeante des Frères de l’Italie, l’objectif des élections en Sicile était de montrer le « modèle gagnant qui peut triompher au niveau national ». Mais, après avoir été écarté pour ses scandales et affaires de corruption, la question est encore de savoir si l’on permettra à Berlusconi de revenir, une fois encore, au centre du jeu politique italien.