Cette semaine en Europe : le pouvoir italien essuie les critiques après la catastrophe de Gênes, un navire humanitaire à nouveau bloqué en Méditerranée, la crise turco-américaine atteint des sommets, Merkel et Poutine s’affirment face à Trump et la gauche française part aux Européennes plus morcelée que jamais…
ITALIE – Le gouvernement sous pression après l’effondrement du Pont Morandi
Le bilan s’est encore accru, dimanche 19 août, à 43 morts, cinq jours après l’effondrement du pont Morandi à Gênes. Mais les funérailles nationales, organisées le même jour, ont été boycottées selon le journal La Stampa par 17 familles qui accusent l’Etat italien d’avoir échoué à protéger ses citoyens. La polémique a également atteint l’un des deux partenaires de la coalition au pouvoir, le Mouvement 5 étoiles (M5S): celui-ci se voit reprocher son refus obstiné au projet de contournement du pont génois depuis 2013, alors que son allié La Ligue prône au contraire le développement économique, souvent au mépris des normes environnementales.
En guise de contre-attaque, le gouvernement italien a immédiatement désigné un coupable : la société autoroutière Autostrade per l’Italia, qui entretenait le pont Morandi. Si la compagnie a déjà promis 500 millions d’euros pour reconstruire l’infrastructure, les deux partis au pouvoir s’opposent sur la révocation de sa concession, la Ligue préférant mettre l’accent sur l’aide aux victimes tandis que le M5S tente d’afficher sa fermeté. Le Premier ministre Giuseppe Conte a quant à lui mis en place l’état d’urgence à Gênes pour un an et débloqué 5 millions d’euros pour la ville.
A la rentrée, c’est toute l’économie de la région qui pourrait être touchée. La capitale ligure, encalminée entre mer et montagne, se reposait en effet sur le pont Morandi pour assurer le transit de 25,5 millions de véhicules chaque année et permettre l’accès au port, désormais isolé. Des embouteillages monstres sont prédits à la fin de l’été et 50 000 emplois pourraient être menacés selon Luigi Merlo, ancien président du port de Gênes.
Lire aussi >>> Matteo Salvini et Luigi Di Maio, deux populistes au pouvoir en Italie
REFUGIES – L’Aquarius trouve un port, le Diciotti en cherche un
L’histoire se répète alors que le Diciotti, navire des gardes-côtes italien, se voit refuser d’accoster à Lampedusa depuis le 16 août dernier avec à son bord, 177 migrants. Matteo Salvini, ministre de l’intérieur italien, prétend que c’était à Malte de secourir les migrants. La Valette se défend en reconnaissant que ces derniers sont passés dans ses eaux mercredi mais en refusant toute assistance, selon elle.
La même situation s’était déjà produite en début de semaine, quand l’Aquarius avait pu accoster à Malte mercredi après plusieurs jours d’errance en mer, avec 141 migrants à bord. La situation avait pu finalement être résolue suite à un accord de répartition de ces migrants entre la France, l’Allemagne, le Luxembourg, le Portugal, l’Espagne et l’Italie. Les navires secourant des migrants sont régulièrement empêchés de débarquer en Europe depuis que l’Italie et Malte ont fermé leurs ports en juin dernier, contraignant les bateaux à errer plusieurs jours en mer le temps des négociations.
Lire aussi >>> Livres, films, musique : la crise des migrants dans la culture
TURQUIE – Erdogan refuse de « se livrer », la livre continue de plonger
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a confirmé lors du congrès de son parti samedi 18 août sa politique du bras de fer alors que les sanctions américaines plombent la devise turque, au plus bas depuis vendredi. En cause : le refus d’Ankara de libérer un pasteur américain, Andrew Brunson, condamné pour espionnage pour des liens supposés avec les indépendantistes kurdes et le prédicateur Fethullah Gülen. Ce dernier est accusé d’être le responsable de la tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016, d’avoir infiltré tout l’appareil d’Etat et habite, depuis 1999, en Pennsylvanie.
Le parquet turc n’a toutefois pu produire en guise de preuve qu’une recette du maklube, « le mets préféré des gülenistes » selon l’acte d’accusation, retrouvée sur le téléphone d’Andrew Brunson, des témoignages anonymes et l’exhumation d’une Bible en kurde qu’aurait écrite le pasteur. Washington a immédiatement répliqué en doublant ses taxes sur l’acier et l’aluminium turc. Mais l’économie turque patine aussi du fait de problèmes plus structurels, comme la forte inflation, l’endettement des entreprises ou la mainmise du pouvoir sur la Banque centrale, lui faisant perdre toute crédibilité.
Résultat : les capitaux étrangers fuient le pays et le pouvoir pourrait se voir contraint de demander l’aide du FMI. En recherche d’alliés, Erdogan se tourne vers l’Europe, face à laquelle il dispose de deux moyens de pression : les banques européennes, qui détiennent beaucoup de la dette des entreprises turques, et les réfugiés présents en Turquie, que le président turc pourrait laisser passer vers le Vieux continent en cas de crise prolongée.
Lire aussi >>> Turquie : dernier arrêt pour la démocratie ?
ALLEMAGNE – Angela Merkel et Vladimir Poutine affichent leur unité
Après une halte controversée en Autriche pour le mariage de la ministre des Affaires étrangères, Vladimir Poutine s’est rendu à Meseberg, en Allemagne, pour discuter avec la chancelière allemande. Les deux dirigeants ont abordé la question du nucléaire iranien, la guerre en Ukraine, celle en Syrie, la crise migratoire et les relations russo-allemandes.
Angela Merkel cherchait en particulier à réaffirmer son accord au gazoduc Nord Stream 2 qui doit permettre à la Russie de doubler ses exportations de gaz vers l’Allemagne, et que Donald Trump avait critiqué en jugeant le pays « complètement contrôlé par la Russie ». Vladimir Poutine a pourtant besoin d’un succès commercial, lui dont l’économie est étouffée par les sanctions économiques américaines et la chute du rouble.
Au plan international, les deux chefs d’Etat ont là encore besoin l’un de l’autre, notamment sur la Syrie : Vladimir Poutine demande l’appui des Européens pour remettre le pays sur pied, tandis qu’Angela Merkel craint de nouvelles arrivées de migrants. Si aucune décision n’a été prise à l’issue du sommet, le président russe et la chancelière allemande ont tenté de présenter un front uni face aux menaces de Donald Trump.
Lire aussi >>> Le futur de notre énergie : perspectives et défis
FRANCE – A gauche, à chacun son couloir pour les Européennes
Merci, mais non merci ! Le socialiste belge Paul Magnette a poliment décliné vendredi l’offre du Parti socialiste français de devenir sa tête de liste pour les élections européennes de mai 2019. L’ancien ministre-président de la Wallonie, connu en France pour son opposition au traité de libre-échange euro-canadien, a expliqué se concentrer sur les élections municipales 2019 à Charlevoix, dont il est maire. Le PS se cherche donc encore une tête de liste tandis que les autres partis de gauche prennent acte de leurs dissensions.
Dimanche, l’écologiste Yannick Jadot a confirmé qu’Europe Ecologie-Les Verts ne s’allierait pas à Génération.s, le mouvement de Benoît Hamon, en espérant pouvoir rassembler les électeurs autour d’un « vote de clarté ». Après la décision des communistes de partir seuls en juin dernier, et la volonté de la France Insoumise de confirmer son hégémonie à gauche en refusant toute alliance, cette décision vient entériner les divisions de la gauche, dont toutes les composantes espèrent engranger des points via le système proportionnel des élections européennes.
Lire aussi >>> L’insurrection wallonne face au CETA : quel avenir pour ce traité ?