Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (22.10 – 28.10)

Exercice de l’OTAN en Norvège, rejet du budget italien, partis politiques français en difficulté pour les européennes, la France et l’Allemagne rencontrent la Russie et la Turquie dans un sommet sur la Syrie, le Parlement européen veut interdire les partis néofascistes : les actualités européennes de la semaine.

OTAN – Lancement d’une opération de grande envergure en Norvège

Ce jeudi 25 octobre, l’OTAN a démarré un exercice d’ampleur inégalée depuis la guerre froide, en envoyant 50 000 soldats de 31 pays différents en Norvège. Prévue jusqu’au 7 novembre, cette opération nommée « Trident Juncture » simule une attaque contre un pays membre de l’Alliance et l’aide de ses alliés en vertu de l’article 5 du traité atlantique. Principalement terrestre, cet exercice est la plus grosse manœuvre otanienne depuis la fin de la guerre froide et marque la première présence militaire états-unienne dans cette zone de Norvège. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, explique cette initiative par le contexte de dégradation sécuritaire en Europe, sans citer la menace simulée mais bien envisagée dans la région : une attaque russe. Face à cette inquiétude, allouée au développement militaire russe – notamment en Arctique – l’organisation a stratégiquement choisi la Norvège, Etat membre qui partage 200km de frontière avec la Russie. En réponse à cette opération proche de sa frontière, la ministre des affaires étrangères russe Maria Zakharova y voit une « violation des traditions de bon voisinage ». Le dialogue est toutefois présent, des observateurs russes ayant été conviés, ainsi qu’une discussion autour du prochain Conseil OTAN-Russie.

ITALIE – Le budget italien a été rejeté par Bruxelles : une première

La Commission européenne a officiellement rejeté le budget italien pour 2019, mardi 23 octobre, après avoir demandé une révision au gouvernement de Giuseppe Conte. Elle l’a jugé contraire au droit européen et au pacte budgétaire, notamment à cause de ses prévisions de déficit public à 2,4% du PIB, et de diminution de sa dette publique à 126,5% du PIB. Pour rappel, le traité de Maastricht exige des Etats membres de ne pas dépasser 60% du PIB pour la dette publique et 3% pour le déficit. « Nous avons affaire à une déviation claire, nette et assumée » estime le commissaire européen Pierre Moscovici.

La crise économique a plus fortement touché l’Italie que ses voisins de la zone euro, mais l’arrivée au pouvoir de la coalition d’extrême droite entre la Ligue et le Mouvement 5 étoiles change ses plans de stabilisation budgétaire, d’abord estimés à 0,8% de déficit par l’ancien gouvernement, pour être revus dangereusement à la hausse. Le vice-président de la Commission en charge de l’euro, Valdis Dombrovskis, explique que « le déficit budgétaire et la dette ne mènent pas à une croissance durable, et une dette excessive rend l’économie plus vulnérable à une crise future ». La Commission reste ouverte au dialogue et demande de nouveau à Rome de changer son projet de budget déficitaire.

FRANCE – Elections européennes : les partis peinent à trouver leurs candidats clé

Les principaux partis politiques français, qui vont bientôt entrer en campagne pour les élections européennes de mai 2019, restent dans le flou quant au choix d’une tête de liste. Il faut savoir que cette élection change de système par rapport aux anciennes : en effet, il ne s’agit plus de scrutin par circonscription mais de liste nationale unique. Il y aura donc 79 candidats, soit le nombre d’eurodéputés français, avec une tête de liste par parti. La difficulté réside dans ce choix stratégique, celui de montrer via un candidat la ligne directrice du parti sur l’Europe. Lourde tâche, quand on connait les divisions internes aux partis comme Les Républicains (LR) ou encore le Parti Socialiste (PS). Le parti de la majorité, La République en Marche (LREM), va vivre sa première élection européenne et veut donc marquer le coup, en tant que pro-européens et de « rempart » aux dérives nationalistes prenant l’Europe de toutes parts. LREM se présente comme alternative au PPE et aux sociaux-démocrates. Mais cette ambition nécessite alliances et personnalités décisives, ce qui s’avère plus complexe au vu de la liste Europe Ecologie les Verts (EELV) menée par Yannick Jadot, qui séduit sans céder de candidat à la majorité. Au PS, la crise interne pose la nécessité d’une redéfinition de la ligne du parti, pas toujours uni en matière d’économie européenne. L’idée de présenter Ségolène Royale a été suggérée cette semaine, au vu de sa stature politique – salvatrice ? – mais rien n’est moins sûr. Côté LR, les accrochages entre les partisans de Valérie Pécresse (pour l’Europe des 28) et de Laurent Wauquiez (pour revenir à l’Europe des 12) sur la structure de l’Europe divisent profondément la vision du parti ; trouver un candidat synthétisant ces visions est pour le moment antithétique. Quant au Rassemblement National (RN, ex-FN) et à la France Insoumise (FI), ils concluent des alliances européennes et peinent moins à trouver une tête de liste cohérente.

SYRIE – L’Allemagne et la France en Turquie avec la Russie pour parler de la Syrie

Samedi 27 octobre, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont rejoint Recep Tayyip Erdogan et Vladimir Poutine à Istanbul, pour un énième sommet sur l’avenir de la Syrie. La venue conjointe de l’Allemagne et la France pour dialoguer avec la Russie et la Turquie est une première sur le sujet syrien. Bien que courte, cette rencontre relance la position de force d’Ankara dans la région, notamment amorcée par l’épisode Khashoggi. Cette rencontre entre l’Europe et les membres du groupe d’Astana, dont les intérêts et visions divergent sur la Syrie, marque-t-elle une avancée dans les négociations de paix ? Un communiqué commun montre l’accord sur un cessez-le-feu à Idlib, région du nord de la Syrie où un bastion rebelle est en proie aux représailles du régime de Bachar Al-Assad. Instauré le 23 octobre par la Russie et la Turquie, ce cessez-le-feu n’est pas vu du même œil par les Occidentaux et Moscou : d’un côté, Paris et Berlin souhaitent protéger la population d’un bain de sang – et éviter un contrôle baasiste – de l’autre M. Poutine y voit une solution temporaire, avec pour vocation de restituer la zone au régime. Ankara, elle, veut à tout prix éviter un contrôle kurde dans la région, et suit la politique russe pour étouffer toute velléité autonomiste.

Malgré ce relatif accord sur la protection de l’enclave d’Idlib, les Européens et les Russes demeurent opposés sur la question de l’avenir politique de la Syrie : Emmanuel Macron et Angela Merkel réitèrent la nécessité d’une transition politique, condition pour le retour des réfugiés en Syrie, tandis que Vladimir Poutine réaffirme son soutien à Bachar Al-Assad et appelle au retour des réfugiés. Entre ces divisions, la France, l’Allemagne et la Turquie ont appelé à la réunion d’un comité constitutionnel de l’ONU pour « donner une nouvelle loi fondamentale à la Syrie ». Seulement, Damas s’y oppose et ralenti tout processus impliquant une révision politique de son régime. Avec pour appui Moscou, le régime ne craint pas les demandes de la coalition internationale sur son avenir. En l’absence des Etats-Unis et de l’Iran, cette rencontre ne pouvait être totalement efficiente.

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UE – Le Parlement européen veut interdire les partis néo-fascistes

Les eurodéputés ont lancé un appel contre la recrudescence des mouvements néofascistes et néonazis en Europe, en adoptant une résolution mardi 23 octobre. Face à la montée de la xénophobie et la tolérance de certains Etats membres envers les groupes promouvant ces tendances, le Parlement européen a demandé ce jeudi leur interdiction. Pour ce faire, les eurodéputés appellent les Etats à condamner fermement tout crime et discours de haine, notamment sur internet, rappelant les attaques de ces dernières années contre des figures politiques comme l’assassinat de la députée britannique Jo Cox en 2016 par un néonazi en lien avec la Ligue de défense anglaise, et l’agression de l’eurodéputée Eleonora Forenza par Casa Pound (groupe néofasciste italien). La multiplication d’agressions à caractère raciste, xénophobe et homophobe inquiète les élus européens sur la tendance souverainiste qui grimpe dans les sondages. Des groupes comme Génération Identitaire en France sont pointés du doigt pour leurs actions violentes et xénophobes, comme CasaPound en Italie et le Front national britannique au Royaume-Uni.

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