Bruxelles renonce à sanctionner l’Espagne et le Portugal

La Commission européenne a décidé d’annuler les sanctions émises à l’encontre de l’Espagne et du Portugal.

Bruxelles a décidé de ne plus soumettre les deux pays à une sanction monétaire après leur déficit de plus de 3% du PIB pour l’année 2015. Bruxelles a recommandé l’annulation des sanctions à l’égard du Portugal et de l’Espagne mais leur a imposé de respecter un déficit de 2,5% du PIB en 2016. C’est désormais au Conseil des ministres des finances (ECOFIN) qu’il advient d’approuver la proposition de Bruxelles.

Le 12 juillet dernier la Commission et l’ECOFIN se sont mis d’accord pour juger inefficaces les mesures prises par les deux pays afin de corriger leur déficit. Outre le fait que ces deux pays n’aient pas réussi à réduire les déficits à moins de 3% du PIB, le Conseil a estimé que les efforts budgétaires ont quand même été réduits malgré les recommandations faites en faveur de l’austérité pour équilibrer les comptes.

Sanctionner : bonne ou mauvaise solution ?

Mardi 19 juillet, la Commission européenne a entamé les premières discussions sur le processus de sanctions à imposer  à l’Espagne et au Portugal dues au dérapage budgétaire de ces deux pays, qui ont vu leur déficit pour l’année 2015 dépasser les 3% du PIB. Ces critères, dits de Maastricht ont été définis en 1992, dans l’article 121 instituant la Communauté Économique, et se basent sur des indicateurs économiques auxquels sont soumis les pays membres de l’UE.

La France et la Grèce ont été les deux seuls États-membres à défendre les partenaires ibériques  lorsque le ministre de l’économie espagnol Luis de Guindos et le ministre de l’économie portugais Marion Centeno, ont souligné les nombreux efforts réalisés par leurs pays. L’Allemagne, l’Autriche, la Finlande et les Pays-Bas ont demandé au contraire plus de dureté envers les pays sanctionnés.

Dès le seuil atteint, la Commission avait rappelé que les deux pays pourraient être soumis à une amende maximale équivalant à 0,2% de leur produit intérieur brut. Les deux pays auraient pu également être soumis à une sanction symbolique, solution étudiée par les Commissaires européens, mais c’est finalement l’annulation des sanction qui l’emporte. Les deux gouvernements avaient envoyé un argumentaire à Bruxelles afin d’exposer leurs propositions en vue de faire annuler toute sanction possible, le Portugal le 18 juillet et l’Espagne une semaine après.

Ressouder l’Europe en temps de crise

Le Commissaire européen Valdis Dombrovskis affirme que ce frein aux sanctions peut représenter une motivation pour que les deux pays puissent accomplir les défis qui les attendent.  “On doit tenir compte des efforts accomplis par ces deux pays. Ils auront la possibilité de réagir, pour demander une réduction, voire une mise à zéro des amendes”. Pour atteindre les objectifs exigés par Bruxelles le Portugal et l’Espagne devront resserrer la ceinture et diminuer les dépenses tout en augmentant les recettes, sans doute par le biais d’une hausse d’impôts.

Pierre Moscovici, de son côté, a déclaré qu’une “punition” ne ferait qu’aggraver le sentiment d’euroscepticisme exprimé par des millions de citoyens européens. Il y a donc eu un consensus politique entre les commissaires européens : « La Commission a fait preuve de sa crédibilité technique et de sa solidité politique. La sanction au sens technique et politique est matérialisée. Mais, entre 2013 et 2015, les deux pays ont fait des efforts budgétaires massifs et des réformes structurelles majeures, certes insuffisantes à l’égard des règles, dont nous ne pouvions pas ne pas tenir compte. »

La Péninsule Ibérique mise au défi

Il est vrai qu’aujourd’hui l’Europe rencontre de nombreuses crises internes qui reflètent le besoin de renouvellement des institutions pour que l’UE puisse survivre et s’affirmer comme étant un pilier de l’unité européenne. Punir le Portugal et l’Espagne ne provoquerait que de nouvelles discordes étant donné que les sanctions liées à un déficit excessif n’ont jamais été appliquées. En 17 ans les critères de Maastricht ont été violés plus d’une centaine de fois par des pays tels que l’Allemagne, la France et la Pologne. L’euroscepticisme est aujourd’hui grandissant, notamment dans les pays en difficulté, comme la Grèce et si Bruxelles ne souhaite pas de nouveaux « exit » il faut s’attendre à un refondement des principes de l’Union.

Dès à présent Madrid et Lisbonne doivent faire leurs preuves et respecter les engagements pris pour réduire le déficit de cette année avant le 15 octobre tout en présentant leurs budgets pour l’année 2017. De plus, l’Espagne doit pouvoir montrer qu’elle est capable de repasser sous la barre des 3% de déficit fin 2018 après que Luis de Guindos ait réussit à négocier avec Pierre Moscovici les deux ans supplémentaires pour réduire le déficit budgétaire. Il a notamment mis en avant l’incertitude politique qui fragilise le pays et qui déstabilise l’économie espagnole.

En savoir plus sur cette thématique :

Portugal : de l’austérité à l’incertitude … Quel avenir pour le pays ?

Le chaos politique en Espagne : une crise sans solution miracle

 

Joao Lobo 

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