Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (du 8 au 14 janvier)

Articles par Eva Gandaloeva et Mona Jansen.

Commission européenne : Une subvention pour une entreprise d’énergie verte

Après hésitation, la Commission européenne donne son accord pour que l’Allemagne reçoive une subvention pour financer une usine de batteries pour véhicules électriques. L’entreprise suédoise Northvolt pourra ouvrir une usine au nord-est de l’Allemagne à Heide au Schleswig-Holstein avec l’aide de la subvention de 902 millions d’euros. Le projet est censé commencer en 2026 pour que l’usine puisse fabriquer entre 800.000 et 1 million de batteries par an à partir de 2029.

Cette subvention a été accordée pour éviter que les industriels quittent l’Europe pour s’installer dans d’autres continents. Le déclencheur a notamment été une subvention de 369 milliards de dollars, soit 347 milliards d’euros de la part du gouvernement des États-Unis en août 2022 afin de lutter contre l’inflation (Inflation Reduction Act IRA). Depuis mars 2023, les Etats-membres de l’Union européenne ont l’autorisation de suivre l’exemple d’autres gouvernements en termes de subventions. Ainsi, si un État étranger accorde une subvention, la Commission européenne peut autoriser les Etats dans certains cas de donner des aides financières. De plus, les Etats peuvent soutenir financièrement la production dans certains secteurs comme par exemple les technologies propres et numériques. Cela a pour but de permettre à l’Union européenne d’aller à reculons quant à la transition de l’industrie automobile vers une industrie verte.

Si l’Union européenne n’avait pas donné son accord pour la subvention, il se peut que l’entreprise Northvolt aurait accepté une proposition d’aide financière des États-Unis pour ouvrir une usine en Amérique du nord.

En vue de la hausse des prix de l’énergie, Northvolt voulait abandonner le projet de fonder une usine à Heide en 2022. Étant donné que Northvolt est, selon Le Monde «l’un des grands espoirs européens de batteries», l’entreprise aide la compétitivité de l’Europe dans le secteur énergétique. Si la société avait accepté d’ouvrir une usine aux Etats-Unis, cela aurait pu nuire à la place de l’industrie d’énergie verte européenne dans le monde.

De plus, les ambitions de l’Europe dans le cadre du pacte vert de la neutralité carbone jusqu’en 2050 appellent pour une plus forte industrie d’énergie verte européenne. La peur d’être écrasé par la concurrence américaine ou chinoise a poussé la Commission à donner son accord pour la subvention.

Ce qui avait auparavant freiné la Commission européenne d’approuver la subvention était la crainte que celle-ci pourrait mettre en déséquilibre l’industrie en Europe.

L’aide financière bénéficiant à l’économie allemande, les autres pays-membres avaient peur que l’Allemagne prenne une position trop prépondérante dans l’industrie de l’énergie verte. Le gouvernement allemand et notamment le ministre de l’économie Robert Habeck, a souligné qu’il faudrait être solidaire par rapport à ce sujet pour pouvoir contrer la concurrence américaine ou chinoise au niveau européen.

Remise en question de l’appareil juridique en Pologne

En Pologne, ce mardi 9 janvier, deux politiciens du parti conservateur Droit et justice (PiS) ont été arrêtés. Il s’agit de l’ancien ministre de l’intérieur Mariusz Kamiński et son vice-ministre de l’intérieur Maciej Wąsik. Le président actuel Andrzej Duda les a accueillis au palais présidentiel pendant la journée et ils n’ont été arrêtés que lorsque le président s’est absenté.

Le 20 décembre, Mariusz Kamiński et Maciej Wąsik ont été condamnés à deux ans de prison ferme. En 2007, les deux politiciens auraient abusé de leurs positions dirigeantes au bureau central anticorruption. Les deux politiciens auraient séduit l’ancien ministre de l’agriculture Andrzej Lepper à la corruption.

Andrzej Duda, appartenant également au PiS, les avait graciés en novembre 2015. La Cour suprême dénonce l’illégalité de cette action car la procédure d’appel n’avait pas été finie. Une grâce ne peut être accordée qu’en cas de jugement définitif selon certains juristes. Le 10 janvier, le président Duda faisait de nouveau référence à la grâce de 2015 en disant qu’elle serait toujours valable.

Le climat politique Polonais étant actuellemennt tendu, l’accord budgetaire devant être trouvé avant le 29 janvier 2024 risque d’être retardé. Si cela se produisait, la chambre basse pourrait être dissoute.

Le gouvernement sous Donald Tusk est au pouvoir depuis mi-décembre. Un des projets des nouveaux dirigeants, moins conservateurs et plus europhiles, est de réformer l’appareil juridique qui a beaucoup été influencé durant la gouvernance du PiS les huit ans passés. L’Union européenne avait même reproché au gouvernement précédent de mettre en danger l’indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs.

Les clivages au sein de l’UE exposés par la comparution d’Israël devant la CIJ

Une audience de la Cour internationale de justice à La Haye, aux Pays-Bas, le 1er octobre 2018.

Ce 12 janvier, la Cour internationale de justice (CIJ) s’est trouvée au cœur d’une affaire complexe alors qu’Israël est confronté à des allégations de génocide émanant de l’Afrique du Sud. Ce dossier met en évidence les divisions au sein de l’Union européenne (UE), non seulement face à la légitimité de l’accusation, mais aussi quant à la réponse à apporter à ce conflit vieux de plusieurs décennies.

Israël, pour la première fois, doit défendre ses actions à Gaza devant un tribunal international. L’Afrique du Sud accuse l’État hébreu de violer la Convention de 1948 sur le génocide, faisant du siège de Gaza une forme de génocide. Cette démarche symbolique soulève des enjeux historiques, Israël ayant été créé en grande partie pour assurer la sécurité des survivants de l’Holocauste. L’Afrique du Sud, en déposant une plainte de 84 pages le 29 décembre, demande à la CIJ de mettre en place un cessez-le-feu temporaire pour soulager les souffrances à Gaza, où les chiffres du Hamas font état de plus de 23 000 décès depuis octobre. Les alliés occidentaux d’Israël, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, contestent vigoureusement ces accusations.

Au cœur de cette affaire, l’UE affiche des divergences notables. Bien que la Commission européenne soutienne en général la CIJ, elle reste prudente et s’abstient de prendre position sur l’accusation de génocide contre Israël. Le porte-parole de la Commission, Peter Stano, souligne que l’UE n’est pas partie prenante du procès, réaffirmant la neutralité du bloc. Cette prudence contraste avec les positions variées des États membres de l’UE. Certains, tels que l’Allemagne, l’Autriche et la République tchèque, traditionnellement proches d’Israël, expriment leur scepticisme quant à la procédure. D’autres, comme la Belgique et l’Irlande, montrent un soutien potentiel à l’action sud-africaine. Les divisions européennes sont également perceptibles dans les récentes déclarations publiques de dirigeants nationaux. Le ministre allemand de l’Économie, Robert Habeck, déclare depuis Israël que critiquer l’armée israélienne ne signifie pas accepter l’accusation de génocide. Les Premiers ministres belge et espagnol, en visite récente dans la région, ont ouvertement critiqué Israël, soulignant des approches traditionnellement pro-palestiniennes. Ces tensions sont susceptibles de prendre une nouvelle dimension lors du prochain sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’UE. Les débats internes sur le droit à l’autodéfense d’Israël et les appels à un cessez-le-feu collectif mettent en lumière les complexités de la politique étrangère commune de l’UE.

Face à cette affaire sensible, l’UE doit naviguer avec précaution pour préserver son unité. Les clivages au sein du bloc reflètent les défis posés par une Europe confrontée à une opinion publique attentive et mondialisée. Chaque position adoptée par les États membres a des répercussions au-delà des frontières, soulignant la nécessité d’une approche équilibrée dans ce contexte géopolitique complexe.

La Lituanie commémore le 33e anniversaire de la répression soviétique : Un renforcement du sentiment national malgré les épreuves

Soldats et représentants politiques commémorent ensemble, ce jour tragique.

Ce 13 janvier, la Lituanie commémore le 33e anniversaire de l’échec de la répression soviétique. Un épisode marqué par la tentative de renversement de l’URSS à l’encontre du jeune État lithuanien.  Cet acte brutal, survenu en janvier 1991, avait entraîné la perte de 15 vies humaines. Aujourd’hui, alors que la guerre en Ukraine continue de faire rage, la mémoire de ces événements historiques reste vive dans l’esprit des Lituaniens.

Le contexte de ces tragiques événements remonte à mars 1990, lorsque la Lituanie a déclaré son indépendance, bien que cette proclamation n’ait pas été reconnue par Moscou ni par la plupart des autres nations. Les tensions ont atteint leur paroxysme le 7 janvier 1991, lorsque le gouvernement lituanien a décidé de libéraliser les prix, provoquant ainsi des manifestations antigouvernementales organisées par des forces pro-soviétiques.

Le président soviétique Gorbatchev, réagissant aux événements, a exigé le rétablissement de la constitution soviétique en Lituanie. À partir du 11 janvier, des troupes russes, dont des unités aéroportées et l’unité spéciale du KGB “Alfa”, ont commencé à occuper des bâtiments clés à Vilnius et dans d’autres villes. Le point culminant des violences a été atteint dans la nuit du 12 au 13 janvier, lorsque les forces soviétiques ont violemment pris d’assaut le studio central de télévision, entraînant la perte de 14 vies.

Malgré le coût humain et les blessures subies par le peuple lituanien, ces événements ont renforcé le sentiment national. Les actes de répression soviétique ont cristallisé la détermination du peuple lituanien à défendre son indépendance nouvellement acquise. Les condamnations internationales qui ont suivi ont également mis en évidence l’unité et la solidarité des peuples autrefois sous le joug soviétique.

Ces épreuves ont façonné une mémoire commune, forgée dans la résistance et la lutte pour l’autodétermination. Aujourd’hui, malgré les défis persistants, la Lituanie et d’autres nations ayant partagé des expériences similaires sous le régime soviétique ont développé un sentiment national renforcé et une détermination à préserver les valeurs de liberté et d’indépendance. Les événements de janvier 1991 restent gravés dans l’histoire, témoignant de la résilience des peuples face à l’oppression.

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