Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (semaine du 2 au 8 décembre)

Guerre en Ukraine : vers une issue du conflit ?

Article écrit par Hélène Schiavitti

Contre toute attente, après bientôt 3 ans d’enlisement du conflit, le président ukrainien Volodymyr Zelensky ouvre une nouvelle voie qui pourrait laisser entrevoir une issue à la guerre. Jusqu’ici, celui-ci maintenait une position ferme : l’Ukraine ne négocierait pas, elle poursuivrait la guerre contre la Russie jusqu’à la reconquête de tous les territoires perdus depuis 2022, et même de la Crimée annexée depuis 2014. Les récentes déclarations récentes de Zelensky lors d’un entretien accordé à Sky News changent la donne puisqu’il s’y prononce en faveur de négociations dans lesquelles il serait prêt à faire des concessions.

La teneur de la déclaration de Zelensky

Ce vendredi 29 novembre 2024, dans un entretien accordé à la chaîne américaine Sky News,  le président ukrainien déclarait : « Si nous voulons mettre fin à la phase chaude de la guerre, nous devrions placer sous le parapluie de l’OTAN le territoire de l’Ukraine que nous contrôlons ». Par ces mots, Zelensky ouvre la porte à une perte temporaire des territoires ukrainiens actuellement occupés par la Russie à condition que les zones sous souveraineté ukrainienne soient placées sous l’égide de l’OTAN. Par ailleurs, il a ajouté que pour « les territoires ukrainiens occupés, l’Ukraine pourra les récupérer par la voie diplomatique » après l’adoption d’un cessez-le-feu. Or, rappelons que la Russie ne contrôle pas moins d’un cinquième du territoire ukrainien, d’autant qu’elle a déjà annexé la Crimée depuis 2014.                            

Carte mise à jour au 2 décembre 2024

Comment expliquer ce changement de doctrine ?

Ce changement de doctrine intervient dans un contexte où le président Trump a été réélu aux États-Unis, après avoir basé sa campagne sur la promesse de mettre fin à la guerre en Ukraine « en 24 heures ». Mais aussi dans un contexte où la Russie renforce sa rhétorique nucléaire après le tir sur l’Ukraine du nouveau missile « Orechnik » de type IRBM (Missile balistique à portée intermédiaire) conçu pour transporter une tête nucléaire bien que ce ne fut pas le cas. Néanmoins, cette démonstration de force par la superpuissance nucléaire russe est loin d’être insignifiante. Au contraire, cet évènement est considéré comme l’un des tournants de la guerre russo-ukrainienne.

Dans ce contexte, les positions du président Zelensky se sont infléchies comme jamais auparavant. Selon le géopolitologue Pascal Boniface, ce changement de doctrine est le fruit d’une pression provenant de Washington puisque Keith Kellogg a averti que l’aide militaire américaine cesserait si une négociation n‘était pas ouverte. Surtout, selon lui cela s’explique par l’absence d’autres alternatives. Face à Zelensky, deux options s’imposent : négocier ou continuer la guerre. Or, l’Ukraine n’a pas les moyens de poursuivre cette guerre ad vitam aeternam face à la Russie.

Mais, malgré cette inflexion doctrinale, le cessez-le-feu demeure encore improbable comme en témoignent les diverses réactions aux déclarations de Zelensky.

Fragments d’ « Orechnik » retrouvés sur le site d’impact dans la ville de Dnipro

Les réactions face à ce revirement doctrinal

Pour le Général François Chauvancy, la proposition de Zelensky est tout bonnement irréaliste car « jamais l’OTAN ne couvrira une zone en guerre pour protéger un autre État, et Vladimir Poutine ne veut pas entendre parler de l’Otan à ses frontières ».

De plus, selon Pascal Boniface, l’idée de récupérer ultérieurement les territoires par la voie diplomatique relève de « l’illusion ». Selon lui, ces déclarations sont une manière pour Zelensky de « sauver la face ». Toujours selon Pascal Boniface, une telle issue du conflit serait une violation du droit international car cela reviendrait à récompenser la Russie par le gain de territoires acquis par la force.

Ainsi, comment interpréter ces déclarations du président Zelensky ? On pourrait y voir un moyen d’habituer les Ukrainiens à l’idée d’une issue du conflit par la voie des négociations, ce qui semble de plus en plus réaliste au vue de la faiblesse de l’Ukraine et de la future prise de fonction du président Trump à la Maison Blanche d’ici janvier 2025. Mais, le peuple ukrainien est-il prêt à de telles concessions ? Selon la journaliste Solenn Riou, face au marasme de la guerre, les Ukrainiens « commencent tout juste à se faire à l’idée d’une négociation ». Néanmoins, cette position se retrouve plus aisément auprès de la population civile ukrainienne que parmi les militaires qui à l’inverse ne veulent pas entendre parler de concessions.

Enfin, la réaction la plus attendue était sans conteste celle du Kremlin mais à l’heure actuelle aucune réponse n’a encore daignée être donnée ce qui n’encourage pas la thèse d’un cessez-le-feu.

L’offensive des rebelles en Syrie se poursuit

Article écrit par Gaspard Rabin 

Depuis mercredi 27 novembre, une offensive rebelle contre le régime de Bachar al-Assad a permis à la coalition d’opposition de contrôler la ville d’Hama et la ville d’Alep. C’est la première fois depuis la fin de la guerre civile en 2016 que les autorités loyalistes perdent la seconde ville du pays. La Russie a soutenu le régime syrien en menant des bombardements mais semble incapable d’être présents sur deux conflits à la fois.

Une avancée fulgurante et une revanche pour les opposants au régime

Depuis plus d’une semaine, la large coalition portée par le groupe rebelle islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS) mène une offensive surprise au Sud du Pays depuis la région d’Idlib. Les insurgés ont annoncé avoir atteint jeudi 5 décembre la quatrième ville du pays Hama après de violents affrontements. Le groupe avait déjà annoncé dimanche soir avoir pris la ville d’Alep, cette fois-ci sans réel affrontement ou opposition. Il avait fallu plus de 4 ans au régime syrien pour reprendre la ville en 2016.

Les rebelles syriens progressent dorénavant vers Homs – IZETTIN KASIM / AFP

Principal soutien de Bachar al-Assad, la Russie a annoncé avoir mené des frappes sur Alep et la région d’Hama. Le Kremlin a appelé le régime syrien à « rétablir l’ordre le plus vite possible ».

La coalition regroupe de nombreuses organisations allant des rebelles kurdes, à celles proches de la Turquie. HTS, anciennement Jabhat al-Nosra ou Organisation de libération du Levant et proche d’Al-Qaïda, constitue une majeure partie des troupes. Ces dernières sont formées par de combattants anti-régimes et par de nombreux syriens ayant dû fuir leurs régions natales lors de la guerre civile.

La dépendance de Bachar al-Assad à ses soutiens internationaux

Bachar al-Assad a de son côté dénoncé une attaque terroriste cherchant à « morceler la région […] et redessiner la carte régionale conformément aux intérêts et objectifs de l’Amérique et de l’Occident ». La menace d’une escalade militaire et d’une déstabilisation de la région préoccupe les pays voisins. S’il a réaffirmé sa capacité à défendre son territoire face au terrorisme, la rapidité de l’offensive des insurgés à démontrer une nouvelle fois son incapacité à contrôler son propre territoire de manière autonome.

La coalition peut d’autant plus compter sur un renforcement de son armement au fur et à mesure de son avancée. En effet, les rebelles récupèrent de nombreux blindés abandonnés par les troupes du régime  .

La Russie, la Turquie et l’Iran ont prévu de se réunir samedi à Doha pour organiser l’aide au régime syrien et proposer une solution à la crise. Le régime syrien espère pouvoir compter sur ses alliés pour mener une contre-offensive dans les prochains jours. Le Hezbollah a déclaré vouloir soutenir le régime avec ses « moyens », mais reste occupé par sa guerre contre Israël. 

Moscou a accusé l’Ukraine d’être responsable de l’offensive rebelle en Syrie et d’avoir entrainé les combattants d’HTS.

Alors que la Chine et la Jordanie ont tous deux rappelé leur soutien à la Syrie et au respect de sa souveraineté, la France, l’Allemagne, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont appelé dans une déclaration conjointe à la désescalade et à la protection des civils et des infrastructures.

La chute du régime syrien après treize ans de guerre civile ?

Pour rappel, la guerre civile syrienne en 2011, marquée par l’utilisation d’armes chimiques du régime contre les rebelles, l’intervention de la communauté internationale et l’installation d’un Califat par l’Etat Islamique à partir de 2014, a causé plus d’un demi-million de morts.

En 2015, la Russie de Vladimir Poutine avait joué un rôle central dans le soutien au régime de Bachar al-Assad face à l’Etat islamique. Cette lutte des loyalistes contre les rebelles et les groupes djihadistes avait permis en 2020 de signer un cessez-le-feu avec les différents groupes encore présents au nord et sur la partie Est du pays. Les alliés de Bachar al-Assad avait réussi à asseoir définitivement le régime syrien sur la majeure partie de son territoire, à l’exception d’une partie sud contrôlée par des groupes djihadistes et certaines « poches » subsistantes de l’Etat islamique.

Après les tremblements de terre ayant touché le pays en février 2022, Bachar al-Assad avait cherché à améliorer son image sur la scène internationale en instrumentalisant le besoin d’aide humanitaire. Le régime avait également opéré un rapprochement avec les pays arabes, notamment la Jordanie, et cherché à s’imposer comme garant de la stabilité contre les groupes djihadistes. Bachar al-Assad, accusé de crime de guerre et crime contre l’humanité contre son propre peuple, a toujours cherché depuis le début de la guerre civile en 2011 le soutien de ses alliés russes et iraniens.

La censure du gouvernement Barnier : quelles conséquences ?

 Article écrit par Hélène Schiavitti

Ce mercredi 4 décembre 2024 marque l’histoire institutionnelle française avec le renversement du gouvernement Barnier suite au vote majoritaire d’une motion de censure, 62 ans après l’adoption de la première sous la Ve République. Dès lors, la question est celle des répercussions et implications de cette situation politique inédite. Dans une ère d’incertitude politique dans laquelle la France est plus que jamais plongée, l’heure est aux spéculations sur plusieurs scénarii possibles : qui succèdera à Michel Barnier ? Emmanuel Macron est-il appelé à démissionner ? Plus encore, la question est celle des répercussions politiques de l’adoption de cette motion de censure : comment fabriquer le consensus politique ? Comment répondre aux impératifs budgétaires ? Et comment l’image de la France sur la scène internationale pâtira de cette situation ?

Vers la motion de censure : point rétrospectif

Le 9 juin 2024, Emmanuel Macron provoque un séisme politique : la dissolution de l’Assemblée nationale suite aux résultats des élections européennes ayant donné la victoire au Rassemblement national. De nouvelles élections législatives se sont alors tenues les 30 juin et 7 juillet 2024 et celles-ci n’ont pas donné de majorité au sein de l’Assemblée nationale. Dès lors, la question qui demeurait dans tous les esprits était la suivante : qui Emmanuel Macron nommera à Matignon et de quel gouvernement héritera la France ? Il aura fallu attendre le 21 septembre 2024 pour que la composition du gouvernement du républicain Michel Barnier soit annoncée. Immédiatement, la légitimité de ce gouvernement a été remise en cause par les différents partis politiques. Sans majorité, le gouvernement ne bénéficiait pas de stabilité et 3 mois après sa nomination le voilà déjà renversé suite à l’adoption d’une motion de censure ce mercredi 4 décembre 2024.

Composition de l’assemblée nationale à l’issue des élections législatives de juillet 2024

Le déclencheur de cette motion de censure n’est d’autre que le recours à l’article 49.3 de la Constitution par Michel Barnier pour faire adopter sans vote le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Mais, par le déclenchement de l’article 49.3, Michel Barnier engage la responsabilité de son gouvernement. Dès lors, le NFP et le RN se sont empressés de déposer une motion de censure. Le verdict est alors sans appel : 331 députés de gauche et du RN ont voté pour l’adoption de la motion de censure déposée par le NFP. La majorité absolue de 288 voix étant atteinte, la loi de financement de la Sécurité sociale est dès lors rejetée et le gouvernement de Michel Barnier censuré en vertu de l’article 50 de la Constitution.

Mais face à cet acte politique inédit, s’ouvre une nouvelle période d’incertitude politique et budgétaire.  

Les implications de l’adoption de la motion de censure et les scénarios possibles

Sans budget, la France est dorénavant également sans gouvernement. Ce saut dans l’inconnu alimente une série d’interrogations quant aux répercussions engendrées par cette censure du gouvernement. Une des principales questions porte sur l’adoption du budget pour 2025 qui semble s’éloigner à l’horizon. Dès lors, il pourrait planer le risque d’un shutdown budgétaire soit d’un « arrêt des activités gouvernementales faute d’accord sur le budget ». Mais des garde-fous sont prévus pour éviter une telle situation et le président Macron, lors de son allocution du 5 décembre, a annoncé qu’une loi spéciale serait prise pour contrecarrer ce risque et permettre l’adoption d’un budget. Un des scénarii possibles serait le déclenchement de la « loi organique relative aux lois de finances permettant de reconduire provisoirement pour 2025 les dépenses et recettes du budget 2024 ». De plus, la France étant plongée dans une incertitude politique et une absence de budget, cela pourrait effrayer les investisseurs et ainsi la Bourse française risquerait d’en être affectée. 

De plus, parmi les questionnements sur les scénarii futurs possibles, les regards se portent naturellement sur le président de la République. Si certains ont cru que l’usage de l’article 16 de la Constitution était une carte entre les mains d’Emmanuel Macron, les experts s’accordent pour invalider cette théorie en démontrant que les conditions ne sont pas réunies et que cela causerait une crise constitutionnelle. Si d’autres ont pensé que cela pousserait le président Macron à démissionner, ce dernier a clarifié ses intentions lors de son allocution du 5 décembre en affirmant exécuter son mandat de 5 ans « pleinement et jusqu’à son terme ». Reste cependant une question primordiale dont la réponse se trouve entre les mains du président : qui succèdera à Matignon ? Théoriquement, aucune obligation constitutionnelle ne lie le président de la République quant à son pouvoir de nomination du Premier ministre. Néanmoins, une règle tacite prévaut selon la logique institutionnelle : le gouvernement ne doit pas aller à l’encontre de l’avis de la majorité des députés. Mais, la question devient complexe lorsqu’aucune majorité ne se dégage à l’Assemblée nationale comme dans la conjoncture actuelle. Si certains à l’instar de Marine Le Pen pensent que l’heure de la cohabitation a sonné, d’autres font circuler des noms issus du camp présidentiel comme celui de François Bayrou, de Sébastien Lecornu ou encore de Gérard Larcher. Cependant, l’heure n’est en réalité qu’aux spéculations. Une autre hypothèse serait d’ailleurs la désignation d’un gouvernement technique. Néanmoins, dans son allocution du 5 décembre, Emmanuel Macron a dit vouloir désigner dans les prochains jours un Premier ministre qui permettrait la formation d’un « gouvernement d’intérêt général ». L’affaire est donc à suivre et, pour l’heure, le gouvernement démissionnaire doit gérer les affaires courantes avant la nomination de son successeur.

Les réactions suscitées par ce coup d’éclat politique

La réaction la plus attendue était sans nul doute celle du président de la République Emmanuel Macron. Celui-ci a pu s’exprimer sans détour et sans mâcher ses mots lors de son allocution du 5 décembre. En effet, le président de la République a évoqué l’adoption de la motion de censure comme étant l’œuvre d’un « front anti-républicain » formé d’une union entre l’extrême-gauche et l’extrême-droite et bénéficiant de la « complicité du reste du Nouveau Front Populaire ». Emmanuel Macron a alors jugé le résultat rendu par les députés comme une preuve de leur « irresponsabilité » dont il ne compte pas endosser la responsabilité. Selon lui, cette censure du gouvernement est le fruit d’un « cynisme » intéressé dans le seul but de « causer le désordre » et de préparer « l’élection présidentielle » de 2027.

Emmanuel Macron lors de son allocution présidentielle du 5 décembre 2024

Mais, la censure du gouvernement Barnier a aussi incontestablement des effets sur l’image de la France à  l’international d’où de vives réactions. D’une part, à en croire les couvertures des différentes presses internationales, la principale victime de l’adoption de cette motion de censure n’est pas Michel Barnier, mais Emmanuel Macron. En effet, tandis que le journal italien de gauche Il Fatto Quotidiano montre le couple présidentiel sous la pluie, le journal O Estado de São Paulo le présente l’air pensif et bras croisés. Par ailleurs, Il Fatto Quotidiano accompagne sa Une d’un titre critique « Avis d’expulsion pour Macron ». D’autre part, si pour la presse française le renversement du gouvernement Barnier jette le pays dans l’incertitude, pour la presse internationale c’est l’Europe qui pâtira de ce marasme politique. Pour le quotidien autrichien Die Presse, c’est “le problème numéro un de l’Europe”, tandis que le journal grec Efsyn présente en Une les visages d’Emmanuel Macron et du chancelier allemand, Olaf Scholz, en écrivant : “Les deux pays les plus puissants de l’Union se retrouvent sans direction et sans budget national, dans un tournant critique pour l’avenir de l’Union européenne ».

Le sursaut de la démocratie Sud-Coréenne

Article écrit par Gaspard Rabin 

Mardi 3 décembre le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a instauré la loi martiale afin de museler l’opposition, avant d’être contraint de la lever quelques heures plus tard par un vote d’urgence des députés. Accusé de « trahison » par les Sud-Coréens et lâché par son propre parti, le président se retrouve sous le joug d’une procédure de destitution, qui devrait être votée samedi 7 décembre. Les rassemblements populaires demandant son départ et son arrestation se multiplient dans le pays.  

Dans la nuit de mardi à mercredi, le président conservateur Yoon Suk Yeol a déclaré la loi martiale face à « la menace des forces communistes nord-coréennes » et contre les « ignobles forces anti étatiques », entrainant une crise politique majeure.

Cette décision a entrainé une réaction rapide des députés qui ont, malgré la menace d’une intrusion de l’armée dans l’Assemblée, voté en urgence l’annulation de la loi martiale. Face à la pression populaire, le président a donc été contraint de lever la loi martiale déclarée quelques heures plus tôt.

Les six partis d’opposition ont déposé une motion de censure contre le président mercredi 4 décembre, l’accusant de « violer la Constitution et la loi ». Le chef de file du parti au pouvoir, Choo Kyung-ho a demandé son départ du Parti du Pouvoir au Peuple (PPP). S’il s’était dans un premier temps opposé à la motion, il a finalement appelé les députés du PPP à soutenir le vote contre le président dont le maintien au pouvoir pourrait « mettre la République de Corée et ses citoyens en grand danger ». La destitution de Yoon Suk Yeol nécessitant un vote du parlement à la majorité des deux tiers, huit députés de son parti devront voter en faveur de la censure pour que la procédure soit adoptée. Si la motion est votée, le président sera suspendu avant la validation de sa destitution par la Cour Constitutionnelle.  

Les employés de l’Assemblée nationale tentant d’empêcher les militaires sud-coréens d’avancer  vers la salle principale le 4 décembre 2024 – Jo Da-un / SIPA 

Appel à la grève « illimitée » jusqu’à la démission de Yoon Suk Yeol

Alors que des milliers de manifestants se trouvent dans les rues de Corée du Sud pour demander la destitution  du président, les députés de l’opposition ont décidés de ne pas quitter l’Assemblée avant le vote de la motion de censure samedi 7 décembre, par peur d’un nouveau coup de force de Yoon Suk Yeol. Le président du parlement a appelé les députés à « défendre l’Assemblée nationale et protéger le peuple et la démocratie ». Le parlement se présente comme un « garde-fou » efficace.

Kim Seung-won, député du Parti démocrate a également déposé une plainte contre le président pour « rébellion », passible de la peine de mort mais qui n’est plus appliquée depuis une trentaine d’années.

Le ministre de la défense Kim Yong-hyun a été contraint de démissionner, alors qu’il avait conseillé le président de déclarer la loi martiale et d’ordonner l’intrusion de l’armée dans l’assemblée.

Le système démocratique déjà menacé

Yoon Suk Yeol n’est pas reparu publiquement depuis la levée de la loi martiale.

Celle-ci avait été déclarée alors que le gouvernement était menacé par l’opposition après avoir annoncé une réduction importante du budget de 2025. Officiellement instaurée pour lutter contre l’ingérence de la Corée du Nord, elle visait principalement à contrôler les médias et interdire toutes activités politiques. Le président est accusé d’avoir ordonné en parallèle l’arrestation de nombreux membres de l’opposition.

Yoon Suk Yeol a obtenu en avril 2024, la majorité au parlement après une cohabitation avec le Parti Démocrate progressiste. Les dérives populistes du président depuis son arrivée au pouvoir en 2022 étaient régulièrement pointées du doigt. L’institut Varieties of Democracy Institute (V-Dem), classait dans son rapport de 2024 la Corée du Sud au 47e rang selon son indice de démocratie, soit 34 place plus loin qu’elle ne l’était en 2019. Depuis son élection, les pressions contre la presse et les « procédures baillons » se multiplient. En 2016 la présidente Park Geun-hye avait, face à la pression populaire, été contrainte de quitter ces fonctions.

La jeune démocratie sud-coréenne, née après le renversement de la dictature par des manifestations massives en 1987, résiste.

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