Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (du 3/01 au 9/01 2022)

Par Laura Comte, Marine Béguin, Henri Fabbro et Hussein Malamelli.

 

Zone euro : l’inflation a atteint 5%, un record inquiétant… 

L’inflation de la zone euro a atteint fin décembre 5%, un niveau qui n’avait pas été dépassé depuis 25 ans. Ce chiffre est alarmant, et s’explique majoritairement par la hausse des tarifs de l’énergie, qui s’élève à près de 26%, selon une estimation d’Eurostat, parue ce vendredi 7 janvier. L’objectif initial de 2% d’inflation par la BCE (Banque Centrale Européenne) semble impossible à atteindre, et ne pourra être envisagé que pour 2023. 

Cependant, la BCE l’affirmait déjà en novembre 2021, cette inflation n’est pas permanente, elle traduit d’après l’institution monétaire le boom de l’économie post-Covid, et la hausse exceptionnelle des tarifs du gaz et de l’électricité. Les tarifs de l’alimentation, de l’alcool et du tabac ont par ailleurs aussi progressé de 3,2 %, contre 2,9% pour les biens industriels et 2,4% pour les services d’après Eurostat.

L’inflation a été notamment élevée dans les pays baltes, avec le plus haut niveau pour la zone euro atteint par l’Estonie (12 %), devant la Lituanie (10,7 %). Cependant, la vague impressionnante du Covid-19 en ce début d’année 2022 laisse planer un énorme doute sur l’économie européenne. Le variant Omicron pourrait changer le cours de l’économie. 

Toutefois, si Omicron continue de renforcer la hausse des prix, la BCE devra encore relever ses projections d’inflation. Cette dernière a d’ailleurs supprimé de son communiqué officiel l’adjectif transitoire qui était initialement utilisé par Christine Lagarde, actuelle présidente de la BCE, pour qualifier l’inflation post-Covid. Ceci devrait grandement inquiéter les pays européens qui peuvent envisager que ce haut niveau d‘inflation pourra durer plus longtemps que prévu.

Quel avenir pour la Bulgarie dans l’Union Européenne ?

Devenue membre officiel de l’Union Européenne le 1er janvier 2007, la Bulgarie fête en ce début d’année 2022 sa quinzième année au sein de l’entité politico-économique des 27. C’est à cette occasion que le nouveau Premier ministre bulgare, Kiril Petkov, a tenu à exprimer sa volonté et son engagement à faire entendre la voix de son pays parmi les 27. 

Nommé, le 13 décembre dernier, premier ministre de la Bulgarie, ce dernier avait annoncé vouloir « éradiquer la corruption en quatre ans », revendiquant également son orientation favorable à l’Union Européenne et à l’Europe. « Tolérance zéro pour la corruption » sont les mots d’ordre pour son parti Nous continuons le changement. 

Animé par ses convictions pro-européennes, le premier ministre bulgare a mis l’accent sur cette date anniversaire dans une vidéo gouvernementale pour les vœux adressés à la nation. En effet, pour son élection, Kiril Petkov avait également annoncé sa volonté de rompre avec l’image de pays le plus pauvre de l’Europe des 27 :

« nous ne devons plus nous contenter d’être à la périphérie de l’UE. Nous devons être son moteur, un membre qui, grâce à la participation de ses meilleurs éléments au développement du pays, puisse contribuer au développement de l’ensemble de l’Union », a-t-il annoncé lors de ses vœux. 

Ses intentions sont donc claires : la Bulgarie a sa place dans l’Union Européenne et elle doit le montrer. Alors que son discours fait consensus en Bulgarie, la corruption reste un problème de taille. Officiellement prévue dans deux ans, l’admission de la Bulgarie dans la zone euro est loin de faire l’unanimité dans le pays : entre crainte de suivre le même chemin que la Grèce et « manque de volonté politique », le taux de corruption inquiète fortement Bruxelles. Alors qu’elle ne respecte pas tous les critères d’adhérence à l’euro, il est probable que la Bulgarie soit contrainte de patienter encore quelques années dans l’antichambre de la monnaie européenne. 

 

La France aux commandes de la présidence du Conseil de l’UE 

Le 1er janvier 2022, pour la première fois depuis 2008, la France a obtenu la présidence du Conseil de l’Union européenne. Jusqu’en juin, celle-ci aura pour mission d’assurer l’entente et la coopération entre tous les Etats membres ainsi qu’entre les différentes institutions européennes.

Le Conseil de l’UE rassemble tous les ministres des Etats et a en charge diverses fonctions. A cet égard, il possède un pouvoir législatif et a la possibilité de modifier ou même d’arrêter le budget européen, ainsi que d’adopter des décisions et de conclure des accords internationaux. Enfin, il peut nommer les membres de certaines institutions comme le Comité économique et social européen, la Cour des comptes ou encore le Comité des régions.

Vendredi 7 dernier, Emmanuel Macron a accueilli les membres de la Commission afin de lancer officiellement la nouvelle présidence. A cet effet, un hommage a été rendu à Jean Monnet et Simone Weil au Panthéon. Cet acte peut d’une certaine manière symboliser la contribution de la France à la construction européenne. 

La présidente Ursula von der Leyen et Emmanuel Macron ont pu alors parler des derniers ajustements quant à cette mission qu’il incombe désormais à la France de réaliser. Des sujets importants ont été évoqués tels que la réforme des salaires minimums, la réforme de l’espace Schengen, la création d’une taxe carbone aux frontières ou encore la nécessité d’une défense européenne efficace. Naturellement, les différentes menaces pesant sur l’Europe ont aussi été centrales telles que la vague omicron ou encore les tensions liées à l’Ukraine. Les deux dirigeants ont déclaré que des discussions se dérouleront bientôt avec le président russe afin d’aborder la mobilisation de dizaines de milliers de soldats à la frontière ukrainienne, laissant présager une future invasion.  

Finalement, toutes ces tensions géopolitiques pourront se révéler être un terrible inconvénient pour la France ou bien permettront d’illustrer la capacité du président sortant à régler de grandes crises internationales et ainsi à légitimer sa probable candidature.

 

Crise politique au Kazakhstan : quels enjeux pour la Russie ?

Suite aux manifestations enclenchées le 1er janvier 2022 au Kazakhstan, le Président Kassym-Jomart Tokaïev a ordonné d’ouvrir le feu ce vendredi « pour tuer sans sommations ». Ce discours du Président a fait réagir la communauté internationale, qui pourra difficilement intervenir face au soutien logistique et militaire de Vladimir Poutine, annoncé le 6 janvier. 

Les manifestations, enclenchées à cause d’une forte hausse de prix du gaz, ont déjà engendré plus d’un millier de blessés et une dizaine de morts de chaque côté selon les autorités. Le Président avait déjà tenté de calmer la situation en concédant la baisse du prix du gaz et en limogeant le gouvernement. Mais des affaires de corruption sont la cause de la réticence des opposants à s’arrêter. C’est dans ce cadre que la Russie, représentée par le général Andreï Serdioukov, a envoyé 3000 soldats en quelques heures le 6 janvier, accompagnés de douze avions militaires rien qu’à Almaty. Les autorités russes défendent vouloir « protéger les installations vitales, les aérodromes et les infrastructures sociales-clés », et précisent que les soldats ne sont pas chargés d’attaquer les manifestants. En réalité, le Président Kazakh a demandé de l’aide par peur d’être renversé, car un grand nombre de policiers ont abandonné leurs postes ces dernières années, ayant permis le pillage d’armes du côté de certains opposants. 

Les troupes russes interviennent sous mandat de l’Organisation du traité de sécurité collective comprenant le Kazakhstan, la Russie, la Biélorussie, l’Arménie, le Kirghizistan et le Tadjikistan, opérationnel depuis 2002. Il s’agit de la première fois que ces troupes sont déployées : le Kirghizistan avait déjà demandé son intervention en 2010 lors d’une grave crise, mais sans réaction. En effet, le traité ne peut être activé qu’en cas d’agression d’un pays tiers. Le Kazakhstan a donc justifié la présence de « 20 000 terroristes armés » venant de l’étranger, expliquant une « ingérence » sur son territoire. 

La sécurité interne du Kazakhstan inquiète fortement la Russie. D’une part, elle souhaite garder une forte influence en Asie centrale, et le Kazakhstan est un enjeu important car 18.5% de sa population est russophone. D’autres intérêts commerciaux sont également à prendre en compte, comme le rôle du Kazakhstan au sein de l’Union économique eurasiatique et au sein de l’Organisation de coopération de Shanghai. Enfin, la Russie y est fortement implantée et ne peut pas permettre l’effondrement du gouvernement : la gigantesque base spatiale à Baïkonour en est un exemple concret. 

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