Articles par Shana De Sousa et Jérémy Balouka.
Elargissement : la Serbie épinglée par la Commission au sein de son rapport annuel
La Commission européenne a adopté ce mercredi 12 octobre son rapport annuel « élargissement » 2022 portant sur les avancées des négociations d’adhésion à l’Union. Ce paquet de mesures et de recommandations fournit une évaluation détaillée des progrès réalisés par les pays des Balkans occidentaux et de la Turquie dans l’optique d’une éventuelle adhésion à l’Union européenne, au regard des événements qui se sont produits dans ces régions en question au cours de l’année.
Si la Commission recommande le statut d’État-candidat à la Bosnie-Herzégovine, à l’égard de laquelle elle admet la mise en œuvre d’efforts notables dans le respect des critères d’adhésion, ce n’est guère le cas pour la Serbie, tancée pour son manque d’effort au sein du rapport.
Officiellement candidate à l’adhésion à l’Union européenne depuis 2012, la Serbie s’est vue épinglée de manière répétée par la Commission européenne pour des postures jugées contraires à une volonté d’intégration au sein de l’Union. L’annulation puis l’interdiction instituées par les autorités serbes de l’EuroPride en septembre dernier ont dès lors largement été condamnées par les eurodéputés ainsi que par les organisations de défense des droits de l’Homme. Si les négociations d’adhésion avec ce pays de près de sept millions d’habitants se poursuivent, la Commission ne relève au sein de son rapport que peu de progrès accomplis par la Serbie à l’égard des critères d’intégration au sein de l’Union européenne.
Le rapport de la Commission évoque en outre que « la conformité de la Serbie avec la politique étrangère de l’UE a considérablement diminué, passant de 64% en 2020 à 45% aujourd’hui », regrettant un recul conséquent de Belgrade vis-à-vis des libertés individuelles, en sus d’une généralisation inopportune et regrettable de la corruption au sein du pays ; s’ajoute à cela une population de moins en moins séduite par la perspective d’une adhésion au sein de l’Union européenne, le public serbe étant pour moitié défavorable à cette éventualité.
La Commission a de surcroît dressé une remontrance sévère vis-à-vis de la politique étrangère menée par le gouvernement serbe depuis le début de la guerre en Ukraine. Bruxelles, à l’instar de Moscou, appelle la Serbie à choisir un camp dans un contexte de conflit s’étendant aux portes de l’Europe. Le rapport de la Commission reproche notamment à Belgrade sa position de neutralité vis-à-vis de l’OTAN et de la Russie et déplore sa persistance à entretenir de bonnes relations avec Moscou, l’invitant à davantage intensifier ses efforts en se joignant aux sanctions européennes à l’encontre de la Russie.
S’il était ainsi initialement prévu que les négociations à l’égard d’une adhésion de la Serbie s’achèvent en 2024, le langage strict du rapport fait douter d’une intégration prochaine du plus grand candidat des Balkans occidentaux à l’Union européenne.
Guerre en Ukraine : Vladimir Poutine propose la création d’un « hub gazier » vers l’Europe
Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdoğan se sont rencontrés ce jeudi 13 septembre, à l’occasion du 6e sommet de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA) au Kazakhstan.
Au cours de cette rencontre, Vladimir Poutine a évoqué la perspective de création d’un « hub gazier » en Turquie, afin de permettre à l’Europe d’acquérir du gaz à des prix moins dispendieux. Le chef du Kremlin a par ailleurs assuré la veille du sommet, que Moscou était disposé à reprendre ses livraisons vers l’Europe par le biais des gazoducs Nord Stream 1 et 2, et ce nonobstant quatre importantes fuites de gaz sur les deux gazoducs reliant la Russie à l’Allemagne en septembre dernier, lesquels ont été cibles d’attaques dont l’origine exacte demeure à ce jour indéterminée.
Cette suggestion du président russe n’a su être favorablement accueillie par la présidence française, qui souligne qu’« il n’y a pour [l’Europe] aucun sens à créer de nouvelles infrastructures qui permettraient d’importer davantage de gaz russe ». L’Elysée soutient en outre que l’Union européenne aspire à la réduction de sa dépendance aux hydrocarbures russes, et rappelle que la part du gaz russe dans le total du gaz livré à l’Union n’a cessé de décroître depuis le début de la guerre en Ukraine, et qu’elle a vocation à diminuer encore davantage.
ONU : la résolution du 12 octobre contre l’annexion des territoires ukrainiens par la Russie
Il s’agit du vote le plus important de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur le sujet de l’Ukraine depuis celui du 3 mars qui condamnait la violation de l’intégrité du territoire et la souveraineté de l’Ukraine par la Russie. Cette résolution du 12 octobre « condamne les tentatives d’annexions illégales » des régions ukrainiennes de Louhansk, du Donetsk, de Zaporijjia et de Kherson suite aux « prétendus référendums illégaux » menés par la Russie dans ces régions. Le texte appelle également à ce qu’aucun État ne reconnaisse ces annexions et réclame le retrait immédiat des troupes russes du territoire ukrainien. En effet, réussir à condamner ces annexions de manière unanime permettrait d’avoir de nouveaux arguments en faveur du droit international pour des situations similaires. Malheureusement, les pays ayant des prétentions sur d’autres territoires forment le noyau dur des abstentionnistes. Mais le vrai objectif de cette résolution co-rédigée par l’Union Européenne était surtout d’illustrer l’isolement toujours aussi vif de Moscou sous les projecteurs de la scène internationale.
Lors du premier vote, les pays contre cette déclaration étaient la Biélorussie, la Corée du Nord, la Syrie, la Russie et enfin l’Erythrée qui s’est cette fois-ci abstenue. En dépit du travail des Etats-Unis, le Nicaragua s’est joint à Moscou en votant contre lors du second vote. Parmi les 35 pays du ventre abstentionniste, on peut distinguer la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Pakistan qui sont restés statiques sur leurs positions, malgré les tentatives de l’Union européenne de rallier notamment le géant indien dans son camp. Le Bangladesh, l’Irak et le Sénégal, qui s’étaient abstenus en mars, ont cette fois voté en faveur de cette déclaration. Le résultat final de ce vote nous montre que 143 pays sur 193 ont voté en faveur de cette résolution, un résultat très similaire au premier vote où 141 pays avaient voté pour.
Cependant, cette résolution a de nombreuses limites. Comme elle n’est pas contraignante, les pays votant pour ne s’engagent à rien. C’est pourquoi des pays – même à l’intérieur de l’Union européenne – peuvent voter pour cette résolution alors qu’ils sont sous influence russe. C’est le cas de la Hongrie où le président Viktor Orban a lancé ce vendredi 14 octobre une « consultation anti-UE » sur les sanctions européennes, et plus généralement de tous les pays fortement dépendants des hydrocarbures russes. De plus, la violation du territoire est l’un des principes le plus basique du droit international, donc il serait mal vu pour un Etat de s’abstenir, voire de voter contre, et en même temps de s’afficher comme un allié du bloc occidental.
To bee or not to bee : la réussite de l’initiative citoyenne européenne « Save Bees and Farmers »
L’Initiative citoyenne européenne « Save Bees and Farmers » a dépassé le million de signatures.
Le 12 octobre, d’après le média indépendant Euractiv, spécialisé dans les politiques de l’Union Européenne, l’initiative citoyenne « Save Bees and Farmers » (sauvons les abeilles et les agriculteurs) a dépassé le million de signatures, obligeant de fait la Commission européenne à présenter une réponse officielle avant le 7 avril 2023. Selon le traité de Lisbonne, en réponse à une Initiative Citoyenne Européenne (ICE), la Commission peut « proposer une législation, prendre d’autres mesures non législatives ou ne pas agir du tout ». Par exemple, lors de la dernière ICE ayant franchi le cap du million de signatures, nommée STOP Glyphosate, la Commission avait retoqué le projet en argumentant que les Etats étaient suffisamment compétents et responsables pour ce qui est de l’utilisation des pesticides sur leur territoire.
Cette initiative citoyenne européenne demande à la Commission de prendre des engagements plus contraignants. Ses revendications phares sont de réduire progressivement de 80% l’utilisation des pesticides de synthèse d’ici à 2030 et de supprimer totalement leur utilisation pour 2035 (alors que la Commission prévoyait une réduction de moitié pour cette date), de restaurer la biodiversité sur les terres agricoles et d’accompagner financièrement les agriculteurs vers des pratiques agroécologiques. Ce nouveau modèle d’agriculture se veut plus durable et plus responsable alors que la surexploitation des sols et des ressources est encore monnaie courante dans les pays de l’Union.
Pourtant, dans un contexte où l’Union Européenne multiplie les accords de libre-échange de nouvelle génération, dans lesquels l’harmonisation des normes sanitaires, sociales, techniques et environnementales joue un rôle prépondérant, dans quelle mesure pourra-t-elle donner suite à des ICE dont la prise en compte impliquerait une renégociation de ces accords ?