Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (du 19 au 25 février)

Articles par Eva Gandaloeva et Mona Jansen

Contestation des normes agricoles : Une preuve de la vulnérabilité croissante  de l’UE

Ces derniers jours nous avons pu être témoin du mécontentement des agriculteurs tchèques, slovaques, polonais, hongrois, et lettons; car en bloquant des points de passage à la frontière entre la République tchèque et la Slovaquie, ils dénonçaient un excès de “bureaucratie” dans les nouvelles normes européennes. La  colère des agriculteurs français s’est désormais étendue à l’Europe centrale, mobilisant des milliers de manifestants et entraînant des perturbations du trafic routier. En effet, des centaines de tracteurs ont occupé le poste-frontière de Hogonin-Holic, perturbant le trafic pendant plus d’une heure. Les manifestants, arborant drapeaux nationaux et pancartes, ont scandé des slogans tels que “Stop à la bureaucratie” et “Stop aux céréales ukrainiennes”. Des actions similaires ont été signalées dans le nord de la République tchèque, où des agriculteurs tchèques et polonais ont partiellement bloqué un point de contrôle.

Les agriculteurs polonais bloquent des routes et des postes-frontières avec l’Ukraine, protestant contre les produits agricoles venus d’Ukraine.

La manifestation a progressivement pris une ampleur régionale, avec la participation de 3 000 tracteurs en République tchèque. Les agriculteurs d’Europe centrale dénoncent la concurrence jugée “déloyale” de leurs homologues ukrainiens, bénéficiant de droits de douane réduits sur les exportations alimentaires depuis 2022. Les tensions ont atteint un point critique lorsque des agriculteurs polonais ont bloqué la frontière ukrainienne et déversé des céréales ukrainiennes sur des voies ferrées, un acte qui fut qualifiée par Kyiv de “provocation politique”. 

La Chambre agricole tchèque, en collaboration avec d’autres organisations agricoles, a publié un communiqué soulignant la nécessité de redéfinir les termes de la Politique agricole commune (PAC) de l’UE, soulignant l’importance de réagir à ces manifestations à l’échelle européenne.

Parallèlement, en France, les agriculteurs ont maintenu la pression avant le Salon de l’Agriculture, bloquant des points stratégiques tels que des centrales d’achat afin de protester contre la politique consistant à maintenir des prix bas exercée par les grands distributeurs.

 Les agriculteurs réclament davantage de transparence et une rémunération basée sur les coûts de production, soulignant l’urgence d’agir pour sauver l’agriculture française. Par conséquence, comme réponse aux manifestations, le Premier ministre français, Gabriel Attal, a annoncé des mesures sur les visas de saisonniers étrangers, les pesticides, et la rémunération, mais les agriculteurs estiment que les actions concrètes tardent à venir.

Les regards sont maintenant tournés vers la visite anticipée du président Emmanuel Macron au Salon de l’Agriculture, bien que sa réception ait été plutôt mitigée, si ce n’est négative.

Quoi qu’il en soit, on comprend que la remise en cause des normes européennes par les agriculteurs de plusieurs pays de l’Europe centrale témoigne d’une remise en question croissante de l’hégémonie européenne. Cette contestation s’inscrit dans un contexte plus large marqué par un profond ras-le-bol de la guerre persistante en Ukraine, soulignant les défis multiples auxquels l’Union européenne est confrontée sur la scène politique et socio-économique.

Deux ans de guerre en Ukraine : Volodymyr Zelensky en première ligne face à l’incertitude

Ce 21 février marque l’anniversaire du début de la guerre en Ukraine. Depuis le début de l’invasion russe il y a deux ans, l’Ukraine, sous la direction de Volodymyr Zelensky, a tenu bon malgré les défis monumentaux. Le président ukrainien, désormais en première ligne, cherche à insuffler un nouvel élan à son pays dans un contexte international difficile et une société et une armée épuisées.

La conférence de Munich sur la sécurité du 17 février dernier a été l’occasion pour Zelensky de rappeler la résilience des Ukrainiens, soulignant les 724 jours de résistance face à l’agression russe. Bien que devenu une figure emblématique de la lutte contre l’agression russe, Zelensky est confronté à des défis croissants depuis l’échec de la contre-offensive estivale de 2023.

Les Ukrainiens continuent de soutenir leur président, avec 69 % souhaitant qu’il reste en fonction jusqu’à la fin de la guerre. Cependant, des signes de mécontentement émergent, avec une augmentation du nombre d’Ukrainiens préférant un seul mandat présidentiel, illustrant une certaine frustration notamment liée à l’éviction du commandant en chef des armées, Valery Zaloujny.

Pendant ce temps, la guerre en Ukraine entre dans sa troisième année, avec des perspectives incertaines quant à son issue. Le front entre l’armée russe et ukrainienne semble figé depuis près d’un an, avec une stratégie ukrainienne défensive mais active. Cependant, des défis majeurs se profilent, notamment face à l’aide occidentale bloquée par le Congrès américain, cruciale pour l’Ukraine.

Malgré les stigmates dévastateurs de la guerre, les perspectives de négociations restent incertaines. Les relations tendues entre les belligérants et le manque de confiance entre la Russie et les pays capables de faire respecter un accord de paix, rendent les pourparlers politiques difficiles.

Zelensky, ferme dans sa position, a exclu toute négociation avec Poutine et a interdit toute discussion avec la Russie sous sa direction. Alors que le scénario le plus probable semble être un cessez-le-feu gelant le conflit, les risques d’instabilité persistante demeurent, comme observé dans d’autres zones de conflit gelées.

Dans un tel contexte, l’avenir de l’Ukraine reste incertain :  entre la résilience ukrainienne, les défis militaires et les possibles évolutions, la complexité du conflit souligne la nécessité d’une réflexion approfondie pour parvenir à une résolution pacifique dans la région.

La pilule du lendemain sans ordonnance : Une nouvelle politique de famille en Pologne?

Ce jeudi 22 janvier, le Parlement polonais a voté une nouvelle règlementation qui permettrait aux personnes à partir de 15 ans d’acheter la pilule du lendemain sans ordonnance. Auparavant, il fallait une ordonnance pour acheter cette pilule. Au total, 224 des 420 députés se sont exprimés en faveur de cette loi.

Il faut encore l’accord du Sénat et la signature du président Andrzej Duda. Il est proche du PiS qui forme actuellement l’opposition conservatrice en Pologne. Il ne s’est pas encore exprimé officiellement sur le sujet. Pourtant, il se serait soucié de l’âge d’accès au médicament, qu’il estime trop jeune.

Une des promesses du programme électoral du nouveau Premier Ministre polonais Donald Tusk étant de réviser la politique familiale du PiS, Donald Tusk avait fourni la proposition de loi.

Avant l’arrivée du nouveau Premier Ministre moins conservateur le 13 décembre 2023, le gouvernement du PiS national et de droite avait instauré une loi demandant une ordonnance pour la pilule du lendemain.

Le nouveau gouvernement a prévu de réviser plusieurs autres décisions prises par leurs prédécesseurs. Parmi ces projets se trouve une volonté de libéraliser l’avortement ayant été restreint sous la gouvernance du PiS. Actuellement, l’IVG n’est légal qu’en cas de viol, d’incest ou si la vie de la mère est en danger. Depuis 2020, l’avortement en cas de “malformation foetale” est interdit par la Cour constitutionnelle. En janvier, le nouveau gouvernement a constitué une proposition de loi selon laquelle l’IVG serait légal jusqu’à la douzième semaine. Pour l’instant, seulement deux des trois partis de coalition s’expriment en faveur de cette réglementation.

Depuis juin 2023, quand Malte a légalisé l’IVG, la Pologne est le seul pays de l’Union européenne à avoir une législation aussi sévère sur ce sujet.

L’accord entre l’Albanie et l’Italie suscite des controverses

Le bâtiment du Parlement albanais

Ce jeudi 22 octobre, le Parlement d’Albanie a ratifié un accord sur la migration avec l’Italie. Même si le traité doit encore être signé par le président Bajram Begaj, 77 sur les 140 députés ont voté en faveur. Le soutien du projet venait notamment du parti socialiste du ministre-président Edi Rama et du petit parti PDIU.

Cet accord prévoit que les migrants sauvés de la mer méditerranée par les garde-côtes italiens pourront être transférés dans des camps au nord-ouest de l’Albanie jusqu’à ce que les autorités italiennes examinent les demandes d’asile. Le traité explicite que les migrants arrivant aux côtes italiennes par bâteau ou sauvés de la mer par des organisations civiles ne seraient pas transférés dans ces camps. De plus, des mineurs, des femmes enceintes, des séniors, des personnes atteintes d’un handicap et des victimes de traite d’êtres humains ne sont pas censés arriver dans les centres en Albanie.

Selon les plans, il s’agit de deux camps pour jusqu’à 3.000 migrants qui seront accueillis dans un centre à Shëngjin pour fournir les premiers contrôles et soins médicaux. Le nombre de demandeurs d’asile pourrait aller jusqu’à 36.000 par an en vue du délai d’environ un mois de consultation de dossiers. L’Italie sera responsable de la sécurité dans les camps et paiera 600 Millions d’euros pour le maintien de ces centres. Selon la ministre-présidente italienne Giorgia Meloni qui avait promis de réduire l’immigration clandestine, ils seront lancés ce printemps. Il s’agirait notamment de faire face à l’immigration croissante.

L’opposition albanaise argumente qu’une partie de la souveraineté nationale serait ainsi transférée à un autre pays ce qui a cependant été rejeté par la Cour constitutionnelle. De plus, la sécurité de l’Etat serait mise en danger. Selon la Commission européenne, le traité ne contrarierait pas la loi de l’Union. Il pourrait même servir d’exemple pour de futurs accords. Volker Türk, le Haut Commissaire du Haut Commissariat des Droits de l’Homme de l’UN s’est cependant soucié d’une arrestation aléatoire des migrants.

Le ministre-président Rama explique que l’Albanie souhaite être solidaire envers l’Italie qui avait accueilli des personnes venant d’Albanie après la chute du gouvernement communiste au début des années 90. Pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne, l’Albanie exprime une volonté de soutenir l’Union européenne dans l’immigration.

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