Le 16 février 2016, la Commission européenne a autorisé l’importation de gaz de schiste, combustible pourtant sous le feu des critiques. La technique d’extraction de celui-ci, appelée “fracturation hydraulique”, est en effet considérée comme extrêmement dangereuse pour l’environnement. Dès lors, quelle situation pour le gaz de schiste aujourd’hui en Europe ?
Lors de la conférence de Paris sur le climat de décembre 2015, la Commission européenne s’est montrée très ambitieuse. Elle a en effet demandé aux États de la planète d’envisager une mutation vers un modèle économique « zéro émission » d’ici 2050. La décision de février 2016 semble alors contradictoire avec ce volontarisme écologique, même s’il s’agit de s’émanciper du charbon.
Sécuriser le bouquet énergétique européen
Le technique d’extraction du gaz de schiste, appelée « fracturation hydraulique », est très controversée. Outre l’utilisation de grande quantité d’eau, ce procédé est accusé de polluer durablement les nappes phréatiques. Par ailleurs, le gaz naturel extrait est composé de méthane, dont l’effet de serre est nettement plus néfaste que le dioxyde de carbone. Mais la Commission s’est défendue en indiquant que la proportion de ce combustible restera importante dans le bouquet énergétique du continent au moins jusqu’en 2030, tentant ainsi de justifier l’accroissement du nombre de sites d’importation. D’autant que le contexte de tensions avec la Russie – qui fournit une bonne partie du gaz à l’Europe – plaide en la faveur d’une diversification des lieux d’approvisionnement.
Pour autant, cela ne consiste pas en un blanc-seing accordé à l’industrie gazière. Au printemps 2016, la Commission a d’ailleurs renvoyé la Pologne devant la Cour de justice de l’UE au motif que la loi polonaise ne respectait pas la directive communautaire sur la nécessité d’une étude d’impact environnemental. Celle-ci prévoit l’évaluation des déchets produits et des impacts sur l’eau et le sol.
Des États membres en proie à la division
Les États membres sont en outre divisés sur la question. Si la France, l’Allemagne ou, très récemment, l’Irlande interdisent l’exploitation du gaz de schiste, d’autres sont moins sévères. Le Royaume-Uni et la Roumanie, par exemple, laissent leur industrie gazière extraire du gaz naturel au moyen de cette technique.
Lors de la campagne pour l’élection présidentielle française, le candidat élu Emmanuel Macron a déclaré, lors d’une interview accordée à WWF le 9 février 2017, qu’il « n’y aura pas d’exploitation de gaz de schiste sous [son] quinquennat ». Toutefois, il a précisé que des organismes publics seront mandatés pour poursuivre la recherche en ce domaine, afin d’évaluer les atouts et les risques d’une telle méthode. Au final, si des solutions peuvent être trouvées afin de limiter les risques, rien ne garantit la pérennité de l’interdiction. En Allemagne, le Bundestag a interdit au printemps 2016 toute exploitation commerciale du gaz obtenu au moyen de la fracturation hydraulique. Les députés seront cependant invités à se prononcer à nouveau sur le sujet en 2021, pour savoir si cette interdiction reste justifiée.
Quelle transition écologique pour l’Europe ?
Si des divisions persistent, une majorité d’États, dont les plus puissants, s’opposent donc à l’exploitation de ces gaz controversés. L’ambition écologique existe bel et bien en Europe, mais il convient de la concrétiser. D’ici à 2020, l’UE s’est fixée l’objectif de 20 % d’énergies renouvelables, et le 4 octobre 2016, le Parlement européen a ratifié l’Accord de Paris sur le climat. Il s’agit d’un symbole fort pour la transition écologique européenne, dont les efforts doivent être approfondis.
Avec le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris, Jean-Claude Juncker a dénoncé « l’abdication » de Donald Trump sur la question climatique. En réaction, la chef de file du groupe Verts-ALE, Ska Keller, a aussi déclaré qu’il fallait compenser ce retrait, au travers d’une plus grande ambition européenne. Les efforts seront d’ailleurs répartis dans tous les États membres, l’exécutif bruxellois ayant enjoint ces derniers à y prendre part. Un autre pas dans la direction d’une véritable Union européenne capable d’arborer un visage écologique convaincant ?
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