Que s’est-il passé en Europe cette semaine ? (9.12 – 15.12.19)

Cette semaine nous nous retrouvons à l’Elysée, où s’est déroulé le sommet entre l’Ukraine et la Russie afin de relancer le processus de paix, puis nous évoquerons le “Pacte vert” d’Ursula von der Leyen, critiqué tant par les conservateurs que par les écologistes. Et pour clôturer cette revue de presse, un point sur la saga “Brexit” avec la large victoire de Boris Johnson aux législatives. Retrouvez ici les actualités européennes de la semaine, rédigées par Agathe Lacour-Veyranne.

Sommet sur le conflit russo-ukrainien : rencontre entre Poutine et Zelensky à Paris

Le président russe Vladimir Poutine et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky se sont rencontrés ce lundi 9 décembre, lors du sommet entre l’Ukraine et la Russie, afin de relancer le processus de paix en Ukraine.

Les différents protagonistes se sont réunis à l’Elysée sous la médiation de la chancelière allemande, Angela Merkel, et du président français, Emmanuel Macron, dans le cadre d’un sommet dit « Normandie ». La dernière réunion avait eu lieu en octobre 2016 à Berlin et s’était soldée par un échec. Les acteurs confirment qu’il ne peut y avoir de sécurité européenne sans progrès sur le conflit russo-ukrainien. M. Macron a constaté que des efforts « ont été accomplis sur le retrait des forces ». Le président français a également annoncé la tenue d’ « un nouveau sommet au format Normandie d’ici quatre mois ».

Le conflit dure depuis cinq ans dans l’Est de l’Ukraine, faisant plus de 13 000 morts. L’élection de M. Zelensky, l’acteur devenu président de l’Ukraine en avril 2019, a permis de relancer un dialogue entre Kiev et Moscou. Seulement, les positions des chefs d’Etat divergent.

Le président ukrainien souhaite une inversion de la séquence prévue par les accords de Minsk de 2015. Il rejette l’idée que les élections dans l’Est soient un préalable, avant toute reprise en main de la frontière orientale. Ce à quoi s’oppose la Russie qui, elle, insiste sur le statut spécial prévu pour l’Est, avant tout vote.

Un rapprochement timide

Depuis trois ans, sous la présidence de Petro Porochenko, le blocage politique était complet entre Kiev et Moscou. Ainsi, depuis l’arrivée au pouvoir de M. Zelensky, des avancées ont été constatées. Les deux Etats ont consenti au désengagement militaire dans trois zones stratégiques, le long de la ligne de front de près de 450 km. 70 prisonniers ont été échangés en septembre et trois navires de guerre ukrainiens, saisis un an plus tôt, ont été restitués en novembre. Ces différentes progressions permettent de transformer la guerre de basse intensité en conflit gelé.

Les protagonistes ont conservé leurs engagements en faveur de l’application des accords de Minsk, restés lettre morte à ce jour. Ils ont également fait valoir leur volonté commune de mettre en œuvre un cessez-le-feu. M. Zelensky a cependant rappelé que « le cessez-le-feu a été proclamé à vingt reprises ces dernières années et à vingt reprises il a été violé ».

Tous les prisonniers devraient être échangés avant le 31 décembre et trois nouveaux points de la ligne de front devraient être désengagés militairement d’ici fin mars 2020.

La question du Donbass

La région du Donbass reste au cœur des débats. Ce bastion industriel de l’Est ukrainien demeure une place stratégique. Les 40 000 séparatistes armés souhaitent la garantie d’un statut spécial ainsi qu’une amnistie. Mais l’opinion publique ukrainienne juge cela inacceptable, notamment en raison des crimes de guerre. Depuis 2014, on compte un million de déplacés.

Kiev a maintenu son souhait d’organiser des élections libres, nécessitant une maîtrise sécuritaire dans les deux provinces de Louhansk et Donetsk, ainsi que le contrôle de la frontière afin d’éviter la circulation des hommes et des armes. M. Zelensky se trouve dans une position délicate car une partie de l’opinion rejette tout compromis sur le Donbass. L’idée d’un retour de l’Etat ukrainien dans le Donbass priverait la Russie d’un instrument de déstabilisation.

Le président ukrainien tient à respecter ses engagements solennels, il exclut une fédéralisation de l’Ukraine en refusant tout compromis territorial et toute influence sur la direction choisie par son pays : « Le Donbass et la Crimée sont des territoires de l’Ukraine ».

Le « pacte vert » d’Ursula von der Leyen critiqué

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a présenté mercredi 11 décembre, la feuille de route qui tend vers la neutralité climatique qui doit ainsi devenir la « nouvelle stratégie de croissance » de l’Union européenne (UE). Le « pacte vert » est un ensemble d’objectifs et de mesures destinées à faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre d’ici au milieu du siècle.

Ce nouveau Green deal européen, qui vise à réduire de 50 à 55 % les émissions de gaz carbone d’ici à 2030, est fondé sur des outils emblématiques comme un Fonds d’aide à la transition et une taxe carbone.

Ursula von der Leyen a ainsi dévoilé sa liste de propositions législatives appelées « 50 actions pour 2050 ». Le point central du pacte vert sera la mise en œuvre d’une « loi climatique » – qui sera proposée en mars – faisant de 2050 la date butoir de la neutralité carbone.

Une feuille de route critiquée par les conservateurs comme par les écologistes

Le Parti populaire européen (PPE) s’est inquiété notamment pour l’industrie et l’emploi si l’Europe tendait à devenir le seul continent à se montrer ambitieux dans la protection du climat.

Le journal Politico a, quant à lui, exprimé la crainte d’une « bataille politique » au sein de l’UE en raison de l’exacerbation des tensions entre les pays occidentaux, plus verts, et les pays de l’Est, encore dépendants du charbon.

Les eurodéputés écologistes ainsi que les militants d’ONG ont estimé que le Pacte vert était encourageant mais pas assez ambitieux. Ils voudraient que l’objectif de réduction des émissions carbone soit fixé à 65 % d’ici à 2030.

L’absence de la Pologne remarquée

Selon le président du Conseil européen Charles Michel, la présentation du Pacte vert est un « signal fort » envoyé par l’Europe, en pleine COP25. En effet, la 25e conférence des Nations unies sur le changement climatique – initialement prévue en novembre à Santiago (Chili), mais déplacée en raison des émeutes en cours – s’est tenue à Madrid du 2 au 13 décembre.

La Pologne n’était pas présente lors de ce sommet de l’UE, non convaincue par le Green deal proposé. Varsovie avait demandé de pouvoir s’engager pour une date postérieure à 2050 – la date de 2070 a été évoquée – ce qui lui a été refusé. Cette absence a été jugée « complètement acceptable » selon Mme von der Leyen.

En effet, le pays est encore très dépendant du charbon. Il s’agit de l’un des principaux pollueurs en Europe. La réduction d’émissions d’ici 2050 lui fait craindre une transition énergétique désastreuse sur le plan économique et social. Le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, avait affirmé que le coût de la transformation énergétique dans son pays était de loin plus élevé que dans d’autres pays.

Autres sceptiques, la Hongrie et la République tchèque, qui exigent ainsi des garanties financières pour atteindre ces objectifs climatiques.

Royaume-Uni : majorité absolue pour Boris Johnson aux législatives

Le premier ministre britannique, Boris Johnson a réuni une majorité écrasante aux législatives, ce jeudi 12 décembre. Cette victoire conforte M. Johnson dans la sortie du pays de l’UE, et lui confère, de facto, une certaine légitimité. Il est déterminé à présenter l’accord négocié avec l’UE, le Withdrawal Bill (acte législatif de retrait), aux députés avant le 24 décembre, afin de procéder au divorce le 31 janvier et d’ainsi mettre fin à ces trois années d’une saga tumultueuse. Dès début février, le Royaume-Uni sera devenu un « pays tiers », et entamera la négociation de sa relation future avec l’UE. M. Johnson assure que le Brexit sera bouclé avant la fin de 2020.

Le parti conservateur décroche ainsi une majorité de 368 sièges sur 650 au Parlement, contre 191 sièges pour le parti Labour de Jeremy Corbyn.

« Très déçu », le leader des travaillistes, Jeremy Corbyn, a annoncé qu’il ne conduira pas son parti aux prochaines élections.

Schémas réalisé par Le Monde pour illustrer les résultats des élections législatives au Royaume-Uni par circonscriptions, ainsi qu’en nombre de sièges au Parlement britannique :

Une victoire bien accueillie par ses homologues

Le président des Etats-Unis, Donald Trump, a félicité sur Twitter Boris Johnson pour sa grande victoire, ouvrant la voie d’un accord commercial entre les deux pays.

Angela Merkel, la chancelière allemande, a également félicité le premier ministre britannique, et a affirmé vouloir coopérer avec le Royaume-Uni en vue d’un partenariat étroit.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a, quant à elle, jugé très ambitieux de négocier la future relation entre l’UE et le Royaume-Uni, après son départ prévu le 31 janvier, d’ici fin 2020. L’UE s’est proclamé prête à négocier la future relation avec le Royaume-Uni.

Les nationalistes écossais en forte progression

En Ecosse, les indépendantistes du Scottish National Party (SNP) ont remporté une victoire majeure, obtenant 48 sièges sur 59 au Parlement face aux Unionistes – en faveur de l’unification de l’Irlande -, qui perdent ainsi leur majorité ce jeudi 12 décembre.

Les indépendantistes comptent ainsi s’appuyer sur ce résultat pour demander un second référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, majoritairement hostile au Brexit, et ce, bien que Boris Johnson soit fermement opposé à une telle consultation. Il a d’ailleurs déjà fait savoir qu’il refuserait ce nouveau scrutin aux Ecossais. Un précédent référendum avait été organisé en 2014.

Les commentateurs politiques s’inquiètent ainsi d’un risque accru d’éclatement au Royaume-Uni.

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