Que s’est-il passé en Europe cette semaine? (Du 6 au 12 novembre)

Articles par Eva Mic et Laeticia Rambour Mertens

L’UE augmente de 25 millions d’euros son aide humanitaire en faveur de Gaza 

La présidente Ursula von der Leyen a annoncé dans un communiqué de presse l’augmentation de 25 millions d’euros supplémentaires d’aide humanitaire, ce qui porte à un total de 100 millions d’euros, le total de l’aide humanitaire européenne. Elle souligne le besoin de faire « tout ce qui est possible pour éviter les victimes civiles » en réaffirmant le droit d’Israël de combattre le Hamas. L’aide s’ajoute à la mise en place d’un pont aérien, de la bande de Gaza à l’Egypte qui aurait permis l’acheminement de 65 tonnes d’aide humanitaire. Malgré tout, cette augmentation est bien éloignée des estimations des 1,2 milliard de dollars estimés nécessaires par les Nations unies. Pas beaucoup plus de 570 camions seraient entrés dans l’enclave depuis le 21 octobre, un rythme bien ralenti, puisque 500 camions entraient chaque jour avant l’escalade des tensions. 

Lors de son discours aux ambassades européennes, Ursula von der Leyen dénonce une situation « catastrophique » et un bilan humain tragique » dans un contexte particulièrement critique sur la scène internationale. Elle dénonce un « sanctuaire de terroristes » à Gaza et préconise l’envoi « d’une force de paix internationale sous le mandat des Nations Unies ». Le commissaire européen chargé de gestion de crises, Janez Lenarčič a lui prévenu mardi que l’aide aux civils devait être « considérablement renforcée ». Il exhorte toutes les parties à ouvrir d’autres points d’entrée dans l’enclave palestinienne : 

« Le droit international exige de toutes les parties impliquées dans un conflit armé, y compris celui-ci, qu’elles veillent à ce que l’aide humanitaire bénéficie d’un accès sûr et sans restriction.(…) Il s’agit d’obligations juridiques internationales, et cela inclut l’ouverture du nombre nécessaire de points d’entrée afin de s’assurer qu’une quantité suffisante d’aide humanitaire puisse entrer dans la bande de Gaza. ».

L’approvisionnement en fournitures humanitaires et en carburant est rendu particulièrement difficile par ce manque d’accès à la bande de Gaza. Pour le moment, il n’existe pas encore de corridor maritime direct, même si c’est un projet qui concerne directement l’Union européenne puisqu’il serait géré par Chypre. Ce projet est d’ailleurs soutenu par la France et par la Grèce bien que l’absence d’un port opérationnel rend difficile sa mise en place. Pour le moment, l’approvisionnement est contrôlé. Le carburant ne peut pas entrer dans Gaza, car bloqué par Israël, de peur que ces réserves soient utilisées par le Hamas pour prévoir de nouvelles attaques. Le carburant est pourtant nécessaire pour alimenter les hôpitaux et les usines de désalinisation de l’eau. Ce qui ne manque pas d’aggraver la situation pour les civils et humanitaires sur place. 

Sur la scène internationale, l’extension de l’aide humanitaire pour les civils de la bande de Gaza devient une évidence alors que la situation est de plus en plus catastrophique et meurtrière. Sans arrêter de soutenir la position israélienne de Washington, le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken affirme le travail actif des Etats Unis pour obtenir de l’aide humanitaire et assurer les acteurs régionaux de leur implication pour « minimiser les pertes civiles. »

La Commission se félicite de l’accord politique conclu en matière de transparence de la publicité à caractère politique

Un accord entre le Parlement et la commission a été trouvé pour encadrer davantage la publicité politique pour éviter les manipulations de l’opinion publique. L’idée : « protéger les électeurs de la manipulation et de la publicité politique cachée en ligne » afin de  reconnaître facilement les publicités à caractères politiques, mais aussi d’en comprendre leur origine. En effet, alerte et préoccupé sur les dangers de la manipulation de l’information, cet accord vise directement les citoyens pour leur permettre de faire des choix éclairés. Par les nouvelles règles, l’objectif est de favoriser des débats politiques transparents, ouverts et informés dans les États membres ainsi que de garantir que la publicité à caractère politique respecte pleinement les droits fondamentaux, comme celui de la vie privée. 

D’autre part, ces règles permettent de lutter et de « mieux protéger la démocratie » des ingérences étrangères. Les entités basées hors de l’UE n’auront plus le droit de financer de publicité politique au sein de l’UE au cours des trois mois précédant une élection ou un référendum. Le scandale de Cambridge Analytica en 2016, cabinet soupçonné d’avoir lourdement influencé le vote en faveur du Brexit en Grande-Bretagne, par exemple, a encouragé la mise en place de mesures comme celle-ci . 

Ainsi, l’élaboration, le placement, la promotion, la publication ou la diffusion d’un message par, ou pour un acteur politique, susceptible d’influencer le résultat d’une élection, d’un processus législatif ou réglementaire ou d’un référendum au niveau national, régional, local ou de l’UE devra être étiqueté comme tel et expliquer le « sponsor » derrière. La Commission européenne déterminera dans les prochains mois comment se fera l’étiquetage et tiendra à jour un registre pour répertorier les publicités politiques. Le principe n’est pas de supprimer tout « influenceur » sur les réseaux sociaux mais de bannir les pratiques manipulatrices et dissimulées. Sandro Gozi, politicien italien, mentionne, par exemple, la pratique de contrats de publicité politique de candidats avec des influenceurs qui vantaient leurs mérites au moment des élections. L’objectif de cet accord est de progresser vers une plus grande transparence politique européenne à toutes les échelles. 

Elle fixe de même des limites sur l’utilisation de technique de ciblage et de diffusion d’annonces publicitaires ainsi que du profilage à l’aide de données particulièrement personnelles comme l’origine ethnique ou les opinions politiques. En effet, une récente étude du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) explique l’utilisation du profilage par les partis d’extrême droite pour fragmenter le paysage politique lors de récentes élections en Allemagne ou aux Pays Bas. Maintenant, les seules données fournies devront l’être en toute connaissance de cause par l’internaute lui-même.

À l’heure des réseaux sociaux et de leurs multiples scandales sur la manipulation des électeurs, cette réforme est un grand pas en avant pour la transparence démocratique souhaitée par l’Union européenne. C’est une mesure qui va pourtant attendre 2025 et manquer la campagne pour les prochaines élections européennes en juin 2024.

 

La Commission Européenne a adopté le paquet “élargissement” 2023

Ce paquet «élargissement» est historique, en ce qu’il regroupe pour la première fois nos 10 partenaires les plus proches candidats à l’adhésion. Achever notre Union est le meilleur moyen d’investir dans la paix, la sécurité et la prospérité pour notre continent” selon Josep Borrell, vice-président de la Commission. Il rappelle ainsi la politique d’élargissement de la Commission, amorcée le 31 octobre par la visite d’Ursula von der Leyen dans les Balkans (voir l’article de la semaine dernière).

European Union flags at European Commission headquarters

Ainsi le rapport détaillé qu’a rendu la Commission le 8 novembre, le paquet “élargissement”, se réjouit de la  bonne volonté globale des pays candidats à l’adhésion. À l’exception seulement de la Turquie, dont le nationalisme d’Erdogan l’éloigne toujours plus de l’Union Européenne sans ouvrir la perspective d’un rapprochement – et du Monténégro, où en revanche la formation d’un nouveau parlement et d’un nouveau gouvernement font naître de nouveaux espoirs de réformes dans le pays, après des instabilités politiques immobilisantes. 

Elle salue les efforts fournis, tout en observant ceux qui restent à faire par les pays candidats pour se conformer aux critères de l’Union, en particulier en terme de lutte contre la corruption, les oligarchies et la criminalité organisée, ainsi qu’en terme de réformes de l’administration publique et de la justice, notamment dans les domaines des élections et du respect des droits de l’Homme.

Enfin, alors que la Moldavie, la Géorgie et l’Ukraine ont demandé et en partie obtenu (pour la Moldavie et l’Ukraine) le statut de candidat dans le contexte de l’invasion de cette dernière par la Russie, la Commission se félicite de l’alignement à la politique de sécurité étrangère commune de l’Union Européenne de la majorité des candidats, seules la Turquie et la Serbie y faisant réellement défaut. 

Le paquet “élargissement” est concluant, puisque la Commission recommande au Conseil d’ouvrir les négociations en vue de l’adhésion avec 4 pays, à savoir l’Ukraine, la Moldavie, la Macédoine du Nord et l’Albanie. Désormais c’est au Conseil de décider s’il veut ouvrir effectivement les négociations ou non afin d’établir un traité d’adhésion, qui devra être signé puis ratifié par les Etats membres et le pays candidat pour que l’élargissement soit parachevé. Ce sont des procédures longues et incertaines, à l’instar de la Macédoine du Nord candidate depuis 2004 – mais la Commission exprime sa volonté de les accélérer et de les fortifier, en adoptant le même jour son nouveau plan de croissance pour les Balkans occidentaux à 6 milliards d’euros. 

L’élargissement fait débat, notamment dans le contexte de la montée des populismes nationalistes… Mais ce rapport laisse croire qu’une plus grande Europe est possible.

Climat : accord entre le Parlement et le Conseil européen sur la loi sur la restauration de la nature  

Alors que 80% des espaces naturels européens sont dégradés, la loi sur la restauration de la nature vise à améliorer la biodiversité en Europe. Ainsi l’objectif principal est la protection des écosystèmes, (forêts, mers, rivières, exploitations agricoles ou encore écosystèmes urbains). D’ici 2030, 20% de la terre et 20 % des eaux de l’Union doivent être restaurés à l’initiative des Etats et sous le contrôle de l’Union Européenne, suivant différents critères en fonction du milieu, comme par exemple le stock de carbone organique dans les sols minéraux des terres cultivées, la plantations de nouveaux arbres, la préservation puis l’augmentation des espaces verts en milieu urbains, … Les Etats membres devront ensuite restaurer progressivement leurs espaces naturels, à titre de 60% pour 2040 puis 90% pour 2050. L’accord met également l’accent sur la lutte contre le déclin des pollinisateurs, tendance qui doit être inversée pour 2030, alors qu’aujourd’hui une espèce d’abeilles et de papillons sur trois est en déclin.

Si elle semble coûteuse, la réalisation de ces objectifs devrait apporter sur le plus long terme plus de huit euros par euro versés. En effet, elle permettrait de lutter contre la hausse du risque de désastres naturels et contre l’insécurité alimentaire. En ce sens, l’accord illustre la politique environnementale de l’Union, qui veut favoriser la croissance verte en permettant la préservation et l’accès à tous aux ressources naturelles. Ainsi l’Europe aspire à être le premier continent neutre en carbone, notamment pour servir de modèle à échelle mondiale. 

En effet, c’est en réponse au cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal, adopté l’année dernière lors de COP15, que la Commission a proposé la loi sur la restauration de la nature. Elle respecte et promeut le programme de ce dernier, qui préconise le partage des ressources scientifiques, notamment génétiques, financières et techniques au niveau mondial afin de ralentir voire d’éviter l’extinction des espèces, l’augmentation de la superficie des systèmes naturels et la promotion du développement durable d’ici 2050. 

Maintenant que la Commission et le Conseil sont parvenus à un accord, ils doivent adopter formellement la loi afin qu’elle puisse être publiée dans le journal officiel de l’Union. Cet accord constitue un grand pas pour l’environnement en Europe – son avenir dépendra de l’engagement effectif des Etats membres. 

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